Teddy Riner, le 12 août  à Rio. | DAMIEN MEYER / AFP

À rendre l’exceptionnel ordinaire, on prend le risque d’en paraître banal. Oui, quatre ans après Londres, comme attendu, Teddy Riner a remporté, vendredi à Rio, une deuxième médaille d’or olympique. Oui, il était le grand favori de sa catégorie des plus de 100 kg et il a logiquement battu en finale le Japonais Hisayoshi Harasawa. A le voir parfois autant dominer ses adversaires, on pourrait croire qu’il n’a qu’à pénétrer sur le tatami pour s’assurer d’en ressortir gagnant. Pourtant, s’habituer aux succès du champion français est un écueil à éviter.

En finale, il s’est imposé dans la douleur, au bénéfice des pénalités : trois pour son adversaire nippon, une pour lui. Dans une ambiance largement tricolore, avec la présence remarquée d’une autre grande championne française, l’escrimeuse Laura Flessel, également double médaillée d’or olympique, Teddy Riner n’a pas craqué.

En demi-finale, la résistance remarquable du judoka israélien Or Sasson, au prénom pas encore prédestiné, a apporté encore plus de panache au sacre du Guadeloupéen. Longtemps neutralisé, bousculé sur une action, Teddy Riner a dû puiser dans ses ressources pour sortir un mouvement victorieux sur le fil. C’est par un waza-ari sur tomoe-nage, une planchette japonaise, qu’il a gagné le droit de disputer une deuxième finale olympique.

Victoire après victoire, le judoka de 2 m 03 et 139 kg repousse un peu plus les limites de son sport. Et se maintenir au plus haut niveau n’est en rien une sinécure. Six ans d’invincibilité, bien plus de 100 combats victorieux, des titres en pagaille, la domination impitoyable de Teddy Riner n’est pas prête de s’arrêter. Le dernier adversaire à avoir battu l’Hercule, le Japonais Daiki Kamikawa lors du Mondial 2010 à Tokyo, pourrait même conserver cet honneur pour toujours.

Riner le carioca

À Rio, rien n’y a fait, pas même l’impressionnant public carioca qui a tenté de faire réaliser des miracles à son protégé en quart de finale, le judoka brésilien Rafael Silva, vaincu par waza-ari. Au premier tour, en une poignée de secondes, le champion olympique en titre avait déposé comme une feuille morte au sol et sur le dos l’Algérien Mohammed Tayeb et ses 100 kg.

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Deux heures avant sa demi-finale, Teddy Riner était dans sa bulle, écouteurs sur les oreilles, isolé derrière des barrières dans le dédale qui entoure l’extérieur de la Carioca Arena 2. Il n’a pas versé dans la facilité tout au long de la journée.

La « Cité merveilleuse » réussit au Guadeloupéen puisque c’est ici même, en 2007 lors des Mondiaux, que le tout jeune champion d’Europe, 18 ans seulement, avait éclos aux yeux du grand public. Il devenait pour la première fois champion du monde, une victoire qu’il allait rendre classique grâce à sept autres succès dans cette compétition. En 2013, six ans plus tard, Teddy Riner remportait d’ailleurs une nouvelle fois le sixième de ses huit titres mondiaux à Rio.

Porte-drapeau de la délégation française lors de la cérémonie d’ouverture, l’unique star de sa discipline est plus que jamais l’un des emblèmes du sport tricolore, le seul judoka à avoir dépassé les frontières de son sport, même si son prédécesseur David Douillet a transformé sa notoriété en carrière politique. Contrairement à d’autres champions olympiques moins médiatisés, la prime de 50 000 euros allouée à tout médaillé d’or français n’est pour lui qu’une goutte d’eau dans un océan. Avec trois millions d’euros de revenus estimés en 2015, Riner est l’homme-sandwich de marques de boisson énergisante, de gâteaux pour les enfants ou de lits.

À 27 ans, s’il en possède l’envie, il a encore au moins une olympiade devant lui. De quoi affoler encore un peu plus les statistiques et s’élever toujours plus haut dans la hiérarchie des plus grands judokas et des plus grands sportifs de l’histoire. À Tokyo en 2020, sa tête serait forcément mise à prix par les Japonais, marris de voir la catégorie reine leur échapper depuis si longtemps.