Silvia Neid, en juin. | FRANCK FIFE / AFP

En Allemagne, il existe un sélectionneur qui possède plus de longévité que l’inamovible et médiatique Joachim Löw, arrivé à la tête de l’équipe masculine à l’été 2006. Silvia Neid, 52 ans, dirige, elle, la Mannschaft au féminin depuis 2005. Dans un an, Löw aura cependant égalé ce record de présence, puisque son homologue quittera ses fonctions après les Jeux olympiques de Rio en septembre. Avant cela, Neid dirigera ses troupes face à la Chine en quarts de finale, vendredi 12 août, à Salvador (21 heures).

Pour son dernier grand tournoi et malgré la présence écrasante des triples championnes olympiques en titre américaines, la sélectionneuse espère bien remporter le trophée, le seul qui manque à son palmarès impressionnant. En onze ans, l’ancienne internationale aux 111 sélections a gagné le Mondial 2007 et deux Euros en 2009 et en 2013. En 2008, lors des JO de Pékin, elle avait mené son équipe à la médaille de bronze. Avant son intronisation en 2005, elle était l’assistante d’une autre femme, Tina Theune-Meyer, qui avait dirigé la sélection de 1996 à 2005.

« Elle a fait ses classes auprès des sélections de jeunes et surtout aux côtés de Tina (Theune-Meyer). C’est assez incroyable de durer aussi longtemps. Au-delà de ses compétences footballistiques, elle en impose. Elle est capable de faire avaler des couleuvres à n’importe qui », admire Marinette Pichon, la meilleure buteuse de l’histoire des Bleues qui commente le tournoi olympique sur France Télévisions.

Chose peu fréquente chez les sélectionneurs, Silvia Neid a derrière elle un passé de grande joueuse. Milieu de terrain, elle a remporté de 1982 à 1996 trois championnats d’Europe et atteint la finale de la Coupe du monde 1995. « C’était une numéro 10 très créative, à la Zidane, toutes proportions gardées. En Allemagne, tout le monde la connaît. Elle incarne le football féminin parce qu’elle a beaucoup gagné et également parce qu’elle est là depuis très longtemps », explique Peter Zeidler, l’ancien entraîneur allemand de Tours, un temps pressenti à Auxerre en juin dernier.

« Elle est assez sauvage, distante... »

Depuis le début du tournoi olympique, l’équipe d’Allemagne se montre poussive, à l’exception de la large victoire contre le faible Zimbabwe (6-1). Menées au score par l’Australie lors du deuxième match, les Allemandes ont égalisé sur le fil (2-2) avant de s’incliner lors de la dernière rencontre de poule face au Canada (2-1). Une défaite qui évite à l’Allemagne de rencontrer la France en quarts de finale, sa meilleure ennemie. Silvia Neid et ses joueuses affronteront donc la Chine pour une place dans le dernier carré, où elles pourraient retrouver les Bleues.

« Silvia connaît ses joueuses sur le bout des ongles. Elle en tire le meilleur. Sa philosophie est basée sur l’humain. Elle a du charisme », juge Marinette Pichon. Un avis que nuance Peter Zeidler en rappelant les critiques qui existent à son encontre en Allemagne : « Elle impose le respect mais elle ne dégage pas de charisme. Elle est assez sauvage, distante et ça peut donner l’impression d’une certaine arrogance. On la critique sur le manque de prise de risque dans son jeu, qui est très organisé mais manque de fantaisie. »

Silvia Neid dirige un entraînement des Allemandes au Canada, le 2 juillet. | GEOFF ROBINS / AFP

L’an passé, l’Allemagne avait battu la France en quarts de finale lors du Mondial canadien mais avait cédé en demi-finale face aux Etats-Unis (2-0). Quelques mois avant la compétition, en mars 2015, Silvia Neid avait annoncé qu’elle se retirerait en septembre 2016 pour prendre le poste de responsable de la promotion du football féminin au sein de la Fédération allemande de football (DFB). Un départ qui interroge Peter Zeidler : « Ce n’est pas très clair. A-t-elle été poussée dehors ? »

Toujours est-il qu’en cas de nouveau podium olympique ou même mieux de première médaille d’or, le débat n’aurait plus lieu d’être. On ne retiendrait que la belle fin d’une entraîneuse qui aura profondément marqué le football féminin allemand et mondial. Et celle qui lui succédera, l’ex-internationale Steffi Jones, aura bien du mal à faire aussi bien qu’elle.