Le premier mandat de l’Américain Jim Yong Kim à la tête de la Banque mondiale (BM) arrive à son terme en 2017. Celui-ci ne fait pas mystère de son souhait de se représenter, mais l’association du personnel de cette institution spécialisée dans le développement et la lutte contre l’extrême pauvreté critique sa gestion. Et, au-delà de la personnalité de M. Kim, fustige le mode de désignation du président de la Banque.

« Il y a une crise de leadership. (…) Seulement un employé sur trois déclare savoir où l’équipe de mana­gement veut nous mener », assène l’association, dans une lettre ouverte aux dirigeants de la Banque publiée le 8 août.

Elle juge le processus de nomination du président trop opaque et politique, et déplore le faible nombre de femmes aux plus hautes positions.

Américain de 56 ans né en Corée du Sud, médecin, anthropologue et expert en santé publique, M. Kim a été choisi par Barack Obama en 2012 pour présider l’institution, la règle tacite étant que l’Europe choisisse le président du Fonds monétaire international (FMI) et les Etats-Unis celui de la Banque mondiale, deux institutions nées en 1944 à la conférence de Bretton Woods.

« Empressement irresponsable »

Mais depuis sa nomination, les polémiques se sont enchaînées. Son plan de restructuration, destiné à faire 400 millions de dollars (358 millions d’euros) d’économies, s’est notamment traduit par la suppression de près de 500 postes sur un total de 10 000. La réorganisation interne a été critiquée.

« Les mauvais changements ont été faits, et en plus mal faits », regrette Lant Pritchett, ­ancien économiste à la BM.

En 2014, Fabrice Houdart, chargé à ­l’époque des projets pour le ­Maghreb, explique dans un blog hébergé sur le serveur interne de la Banque qu’il craint que « l’empressement irresponsable de faire des économies fasse des dégâts irréversibles ».

Les primes salariales, proposées dans un contexte de rigueur budgétaire à certains cadres dirigeants, avaient provoqué un mouvement social exceptionnel en 2014. En 2015, Jin-Yong Cai, alors dirigeant chinois de la Société financière internationale, filiale de la Banque, avait autorisé la Chine, de manière controversée, à accroître ses prêts à la BM. La trésorière de l’institution, Madelyn Antoncic, avait dénoncé un conflit d’intérêts : elle a été contrainte à la démission.

Hégémonie américaine

Au-delà de M. Kim et de sa gestion, beaucoup contestent l’hégémonie des Etats-Unis. Les pays émergents, notamment, aimeraient être mieux représentés à la Banque. En 2012, une partie d’entre eux avait soutenu sans succès la candidature de Ngozi Okonjo-Iweala, qui était alors la ministre des finances du Nigeria. Mais, comme pour les onze précédents présidents, c’est un homme, américain, qui a été choisi par la Maison Blanche.

Malgré cette nouvelle fronde, M. Kim garde de bonnes chances de conserver son poste. Il aurait reçu le soutien informel de « plusieurs actionnaires majeurs, notamment de la Chine et de l’Allemagne », selon le Wall Street Journal, et de plusieurs membres du conseil d’administration, selon le Financial Times. Et entretient de bonnes relations avec Hillary Clinton : la candidate démocrate à la présidentielle américaine l’a soutenu en 2012, et Partners In Health, une ONG dont il est un des cofondateurs, a travaillé étroitement avec la Fondation Clinton.