Thiago Braz da Silva est le nouveau champion olympique de la perche. | JOHANNES EISELE / AFP

Alors qu’une deuxième médaille d’or consécutive lui tendait les bras, Renaud Lavillenie a été battu sur le fil par le jeune Brésilien Thiago Braz Da Silva au prix d’un nouveau record olympique (6,03 m). Tenant du titre, le Français avait pourtant réalisé 5,98 m, soit un centimètre de mieux que le précédent record qui lui appartenait depuis Londres.

Le concours a été perturbé par des conditions climatiques difficiles, à commencer par un vent puissant. Puis, lorsque les fortes raffales ont disparu, une pluie intense a pris le relais. Comme si la divinité Lansã, qui contrôle les vents et les eaux selon le candomblé brésilien (religion afro-brésilienne), avait décidé de se rappeler au bon souvenir de ces simples mortels qui défient les lois de la gravité.

Une fois le calme revenu, le balais passé sur la piste d’élan et le matelas de réception plus ou moins séché, les perchistes ont pu reprendre à zéro leur concours, qui avait à peine débuté sur trois échecs à 5,50 m. A l’abri dans les couloirs du stade olympique de Rio, Renaud Lavillenie ne semblait pas affecté : souriant, discutant avec l’un de ses rivaux, l’Américain Sam Kendricks, ou jouant avec la caméra indiscrète qui le diffusait sur en direct sur grand écran.

Le perchiste français devait éprouver de la satisfaction, celle de n’avoir pas à défier directement les éléments, qui font parfois de sa discipline une véritable loterie lorsqu’elle est pratiquée en plein air. A Amsterdam le mois dernier, Lavillenie avait ainsi échoué à conquérir un huitième titre européen lors d’une finale fortement perturbée par le vent. A Rio, le pire fut évité, même s’il fallut patienter quinze minutes supplémentaires entre la barre à 5,50 m et la barre à 5,65 m à cause d’un problème sur le perchoir.

Comme à son habitude, le champion olympique en titre commençait par regarder sauter ses concurrents. Seul le Brésilien Thiago Braz Da Silva avait également décidé de faire une impasse et de débuter à 5,65 m. Lavillenie choisissait de s’attaquer d’entrée à une barre à 5,75 m. Célébré par les chants de supporteurs de football de la colonie française regroupée dans le virage le plus près du sautoir, il franchissait aisément l’obstacle.

Impitoyable écrémage

Avant cela, à l’image de quatre autres concurrents, le Canadien, Shawnacy Barber, était le premier favori éliminé à cause de trois échecs à 5,65 m. Le champion du monde en titre avait pourtant sauté pour la première fois six mètres cet hiver. Le perchiste français n’a peut-être jamais été sacré champion du monde mais cela ne l’empêchait pas de mener les débats en survolant des barres à 5,85 m et à 5,93 m. Thiago Braz Da Silva s’accrochait à 5,85 m et échouait une première fois à une barre à 5,93 avant de la franchir à son deuxième, battant son record en extérieur.

L’impitoyable écrémage faisait son œuvre : le Polonais Piotr Lisek était éliminé. L’Américain de 23 ans, Kendricks, disparaissait à son tour pour laisser place au dernier duo de la soirée. Le chouchou du public était le dernier à défier le recordman du monde. Sans la moindre pitié, transcendé par le parfum des Jeux, Renaud Lavillenie enchaînait un quatrième saut réussi à 5,98 m. Le record olympique de Londres, qui lui appartenait, était battu d’un centimètre. De quoi assommer son impudent jeune adversaire de 22 ans.

Pourtant, l’improbable allait se produire. Alors que l’on pensait le concours joué, Da Silva écrasait son record personnel et franchissait à son deuxième essai 6,03 m. La foule carioca éructait et ne manquait pas de siffler celui qui pouvait encore priver son protégé d’un exploit incroyable. Certainement atteint moralement, Lavillenie ne parvenait pas à franchir 6,08 m. Après ses échecs lors des Mondiaux 2011, 2013 et 2015, il subit un quatrième revers d’importance.

Onzième champion olympique de l’histoire de l’athlétisme français à Londres, Renaud Lavillenie a échoué à se succéder à lui-même. L’Américain Bob Richards, médaillé d’or des Jeux d’Helsinki (1952) et de Melbourne (1956), est toujours le seul perchiste de l’histoire à avoir conservé son titre olympique.