Manuel Valls, le 22 août 2016. | PASCAL ROSSIGNOL / REUTERS

S’exprimant sur BFM TV et RMC au sujet des arrêtés anti-burkinis pris dans au moins 30 communes littorales françaises depuis le début de l’été, interdisant le port de ce vêtement de bain cachant le corps et les cheveux, le premier ministre Manuel Valls a estimé jeudi 25 août, que les arrêtés municipaux anti-burkini n’étaient « pas une dérive ».

Il répondait ainsi à la ministre de l’éducation Najat Vallaud-Belkacem qui venait de déclarer sur Europe 1 que la « prolifération » de ces arrêtés n’était « pas la bienvenue ». « Jusqu’où va-t-on pour vérifier qu’une tenue est conforme aux bonnes moeurs », s’est interrogée la ministre, tout en rappelant son opposition au burkini.

« Ces arrêtés ne sont pas une dérive. C’est une mauvaise interprétation des choses. Ces arrêtés ont été pris au nom même de l’ordre public », a déclaré le premier ministre. Saisi par la Ligue des droits de l’homme, le Conseil d’Etat doit se prononcer jeudi sur la légalité des arrêtés anti-burkini.

« La France est un pays différent »

Le premier ministre réitère son soutien aux maires qui prennent des arrêtés « anti-burkini », dont « l’application », dit-il, doit toutefois se faire « avec discernement ». Le 17 août, il avait affirmé que le port du burkini n’était « pas compatible avec les valeurs de la France et de la République ».

Interrogé au sujet des critiques émises par la presse internationale, le premier ministre tranche : « la France est un pays différent ». « La conception libérale des anglo-saxons n’est pas la mienne .(...) La laïcité est le fruit d’une confrontation mais c’est aujourd’hui la possibilité de croire ou de ne pas croire »", a-t-il dit.

« Le burkini c’est un signe politique de prosélytisme religieux qui enferme la femme. (...) Je crois qu’on ne peut pas accepter le prosélytisme mais on ne peut pas accepter l’humiliation non plus. »

Manuel Valls faisait ainsi référence à une autre affaire : la verbalisation d’une toulousaine portant un simple voile sur la tête à Cannes. Il a jugé à ce propos que « tout ce qui peut apparaître comme une stigmatisation » est « évidemment condamnable ».

« Nous ne sommes pas en guerre contre l’Islam qui a toute sa place dans la République.(...) La République est bienveillante (avec les musulmans), nous les protègerons contre les discriminations », a dit Manuel Valls. Le Conseil français du culte musulman avait demandé mercredi à être reçu en urgence par le ministère de l’intérieur, responsable des cultes.

La « laïcité des plages »

Prudent, le ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve a soutenu le premier ministre et exigé à la fois une « fermeté absolue sur la laïcité » et une « proportionnalité » dans la mise en œuvre de ces arrêtés :

« Comme l’a indiqué le premier ministre, on peut prendre ces arrêtés mais il faut prendre dans un contexte où ils permettent de faire cesser les troubles à l’ordre public sans jamais perdre de vue la fraternité. »

Mercredi, la gauche s’émouvait, outre le sort de la mère de famille toulousaine en particulier, de la « traque » et des « humiliations publiques des musulmans », selon les termes des Jeunes socialistes.

« La “laïcité des plages” est la dernière trouvaille des racistes et des islamophobes pour attiser les haines. »