Une secouriste avec un chien, à Amatrice, mercredi 24 août. | REUTERS

Mercredi 24 août. 3 h 38. La terre tremble au centre de l’Italie, détruisant trois villes et causant des centaines de morts. Jean-Claude Cordeau, président du Groupe intervention secours (GIS-France), contacte les bénévoles de son ONG spécialisée dans l’aide d’urgence après les catastrophes et propose son aide aux services de la protection civile italienne. « Ils nous ont dit qu’ils avaient les moyens nécessaires dans l’immédiat, mais on reste en stand-by. Notre paquetage est prêt, le matériel est conditionné, inventorié, on n’a plus qu’à le charger. »

« Difficile de coordonner trop d’équipes »

Pour cet infirmier spécialisé dans la médecine de catastrophe, ce séisme meurtrier en Italie rappelle des souvenirs : « Je suis intervenu à L’Aquila, en 2009. C’était la même région, presque la même intensité de séisme et le même horaire – 3 h 32 à L’Aquila ! –, en pleine nuit, au moment où les gens sont chez eux. » En revanche, alors que L’Aquila était une ville de 70 000 habitants, les secours italiens doivent cette fois intervenir dans des localités éparses, moins peuplées mais difficiles d’accès. « La reconnaissance et l’état des lieux est plus compliqué », précise M. Cordeau.

En revanche, souligne-t-il, « les secours semblent beaucoup plus structurés, avec un responsable identifié, alors qu’à L’Aquila, il était difficile de trouver un poste de commandement. Des leçons semblent avoir été tirées ». Le refus de l’aide internationale semble plutôt logique pour le président d’ONG : « Le problème avec trop d’équipes, c’est de les coordonner. Faire travailler les chiens, et écouter sous les décombres devient compliqué s’il y a trop de monde ou de bruits parasites. On risque aussi le suraccident car les matériaux sont instables. »

Le danger des répliques

Après un séisme, les répliques sont fréquentes. A Amatrice, par exemple, 460 secousses ont été enregistrées depuis le séisme de mercredi. « Les gens qui le peuvent sortent très vite des bâtiments, mais souvent, ils ne veulent pas quitter leur rue, car ils recherchent des proches ou des affaires. Or, le risque c’est d’avoir des murs qui tombent. » Les équipes d’ONG qui interviennent sur le terrain viennent avec leurs tentes, qu’ils installent dans des endroits sécurisés.

Les spécialistes en sauvetage-déblaiement arrivent avec leur matériel d’écoute, des capteurs posés sur les dalles des bâtiments pour entendre les personnes bloquées sous les décombres. « On peut aussi faire passer des caméras dans les failles, explique Jean-Claude Cordeau. Pour aller chercher les victimes, on a aussi des coussins de levage, des dispositifs pour couper le béton, des trépieds, poulies et cordes… »

« Le chien peut sentir à travers plusieurs mètres »

Mais alors que les dispositifs techniques peuvent être limités (par le manche télescopique de la caméra, le silence indispensable à l’usage du matériel d’écoute), les secouristes peuvent compter sur un « allié primordial » : le chien de recherche. Selon la protection civile italienne, 70 équipes cynophiles ont été déployées depuis mercredi.

« Le chien peut sentir à travers plusieurs mètres, selon la nature du matériel. Dans un premier temps, il “balaie” tout le bâtiment pour prendre en compte les odeurs des secouristes, des lieux. Ensuite, il fera la différence entre ces odeurs captées autour et ce qu’il y a dessous, sans se laisser berner par des odeurs parasites comme les aliments en putréfaction. »
« Lorsqu’il sent quelque chose, il aboie ou gratte – on dit qu’il “marque” – quand la personne est vivante, et il réagira différemment, en se couchant par exemple, si la personne est morte. Le maître-chien le comprend. »

Le danger des bâtiments anciens

La recherche de personnes ensevelies dans un séisme est une course contre la montre. Jean-Claude Cordeau estime que « c’est difficile de retrouver des vivants au-delà de cinq à six jours », même s’il est arrivé de secourir des personnes après quinze jours. Le climat estival semble plutôt favorable, même si les températures sont descendues à 10 °C la nuit dans ces zones montagneuses de l’Italie.

En revanche, l’aspect ancien, voire médiéval, de certains édifices d’Amatrice, Accumoli et Pescara del Tronto laisse craindre que le bilan humain s’alourdisse : « Quand les bâtiments modernes s’effondrent, entre deux dalles de béton, on garde des espaces de survie potentiel, comme dans un millefeuille, ce qui n’est pas le cas des bâtiments en pierre que l’on voit dans ces villages. »