« Garder un contact avec le monde du travail, pouvoir montrer à un employeur que l’on a été actif durant certaines périodes, même courtes, est positif » (Photo: une agence Pôle emploi à Paris, en 2013). | CHRISTIAN HARTMANN/ REUTERS

Lorsque l’on est demandeur d’emploi, vaut-il mieux se consacrer pleinement à sa recherche d’emploi ou occuper un emploi temporaire, souvent à temps partiel ? Et quel est l’impact d’une activité réduite sur le retour à l’emploi et sa qualité ?

Pour répondre à cette problématique, plus complexe qu’il n’y paraît, Pôle emploi a retenu cinq laboratoires de recherche qui ont mené différentes études autour de cette thématique, avec le concours de son conseil scientifique, présidé par l’économiste Jérôme Gautier.

L’activité réduite est une activité rémunérée d’au moins une heure dans le mois. Cela peut être un temps partiel, des missions temporaires, etc. « La question était de savoir si pratiquer une activité réduite a une incidence positive ou négative sur le parcours professionnel, explique Stéphane Ducatez, directeur des statistiques à Pôle emploi. A-t-elle un effet tremplin pour accéder à un emploi plus durable et régulier ou au contraire, un effet d’enfermement dans des petits boulots, avec le risque d’avoir des difficultés à retrouver un emploi pérenne et de qualité ».

Une question importante puisque ces pratiques sont en très forte progression. Fin 2015, plus du tiers des 5,4 millions de demandeurs d’emploi en catégorie A, B ou C exerçait une activité réduite (dont 62 % de femmes). La proportion de demandeurs d’emploi en activité réduite a triplé depuis le milieu des années 1990. Par ailleurs, entre 1980 et 2000, le nombre de CDD a été multiplié par trois en France et l’intérim par six. Enfin, la part des CDD dans les embauches est passée de près de 73 % fin 2008 à près de 84 % à la mi-2014.

Pôle emploi vient de publier les résultats détaillés de ces recherches. Il en ressort que l’activité réduite constitue un tremplin vers un emploi durable. Même si tous les chercheurs ne sont pas forcément d’accord sur l’ampleur du phénomène, il existe en revanche un consensus pour dire que l’activité réduite témoigne d’un effet plutôt positif.

Une équipe de chercheurs avance le chiffre de 3 à 5 mois de réduction de période de chômage, selon l’intensité de l’activité réduite. « Dans l’ensemble, ces pratiques accélèrent donc la sortie du chômage. De plus, elles n’ont pas d’effet sur la qualité du travail retrouvé et ce, quel que soit le métier, le secteur d’activité ou les caractéristiques de la personne » précise Stéphane Ducatez.

La perception des employeurs

Ces études basées sur des modélisations assez complexes et sur des entretiens confirment donc scientifiquement ce que le bon sens pouvait prédire. A savoir que garder un contact avec le monde du travail, pouvoir montrer à un employeur que l’on a été actif durant certaines périodes, même courtes, est positif. « Les craintes d’enfermement dans la précarité que peuvent ressentir certains demandeurs d’emploi qui enchaînent parfois des emplois temporaires ne sont donc globalement pas fondées », analyse Pôle emploi.

Par ailleurs, une équipe de chercheurs s’est intéressée à la manière dont les employeurs percevaient ces demandeurs d’emploi qui pratiquaient l’activité réduite, en utilisant le testing. De façon générale, il n’y a pas ou peu d’effet de discrimination ou stigmatisation de la part des employeurs surtout dans les secteurs d’activité où ces pratiques sont assez courantes, voire constituent la norme (par exemple dans l’hôtellerie et la restauration). « Sauf si l’activité réduite est vraiment atypique dans un secteur ou un métier (par exemple la comptabilité), elle est donc plutôt bien perçue, résume Stéphane Ducatez. Parallèlement, les formes atypiques d’emploi se multipliant et se généralisant, cette perception favorable devrait se répandre ».

Améliorer l’offre de services

Pôle emploi va utiliser les résultats de ces recherches pour continuer à améliorer son offre de services et de conseils en direction des demandeurs d’emploi. « L’activité réduite n’est généralement pas perçue comme satisfaisante à la fois par les demandeurs d’emploi et par les employeurs. Notre rôle est de trouver des solutions pour améliorer ces situations », indique Pôle emploi. Par exemple, les demandeurs d’emploi regrettent souvent que pour les offres d’emploi à temps partiel, seul le volume horaire soit indiqué mais pas les horaires proposés.

C’est pour cette raison que Pôle emploi a lancé en juin 2016 Pôle talents (pole-talents.fr) dans six régions tests. Cette plate-forme permet aux demandeurs d’emploi d’optimiser leur emploi du temps avec le moins de « trous » possibles en cumulant différentes offres d’emploi à temps partiel avec des plages horaires spécifiées.

L’objectif est de favoriser des emplois les plus durables possibles. Les groupements d’employeurs qui visent à créer pour le salarié un temps complet à partir de plusieurs temps partiels répondent à ce même objectif.