A firefghter and rescuers walk near rubble and debris of a destroyed building in the damaged central Italian village of Amatrice on August 26, 2016 two day after a 6.2-magnitude earthquake struck the region killing some 250 people. The death toll from a powerful earthquake in central Italy rose to 250 on August 25, 2016 as rescuers continued a grim search for corpses and powerful aftershocks rocked the devastated area. The Civil Protection agency which is coordinating the rescue effort said that in addition to the dead, 365 people had suffered injuries serious enough to be hospitalised. Several of them are in a critical state. / AFP / ANDREAS SOLARO | ANDREAS SOLARO / AFP

Deux jours après le tremblement de terre qui a secoué le centre de l’Italie et partiellement détruit trois villages, les secours étaient encore à pied d’œuvre, vendredi 26 août, pour dégager des victimes ensevelies. Tandis que l’espoir de retrouver de nouveaux survivants s’amenuise, la protection civile italienne a, une nouvelle fois, revu le bilan humain à la hausse, vendredi matin, faisant état de 267 morts et 387 blessés hospitalisés.

Patrick Coulombel est président et directeur de l’ONG Architectes de l’urgence. Cette fondation d’utilité publique est très présente sur les terrains au lendemain de catastrophes naturelles. Actuellement, elle reconstruit notamment des écoles aux Philippines et au Népal.

Comptez-vous vous rendre en Italie ?

Patrick Coulombel : Nous partons là-bas en début de semaine prochaine. Nous allons voir avec nos confrères italiens ce que nous pouvons faire ensemble. S’il y a des autorités locales que cela intéresse, nous pouvons leur proposer notre expertise dans la définition pertinente de périmètres de sécurité. Nous sommes en mesure de travailler de façon fine, bâtiment par bâtiment, sans interdire d’accès un secteur complet comme peuvent le faire les pompiers. Par ailleurs, cela nous intéresse de voir les bâtiments qui ont tenu debout ou pas, car nous intervenons dans la reconstruction de plusieurs sites, notamment au Népal, non sans difficulté.

La situation vous rappelle-t-elle le séisme de 2015 au Népal ?

Techniquement parlant, les types de constructions de l’Amatrice et des villages autour sont comparables à ceux du Népal. Dans ces deux cas, comme à L’Aquila d’ailleurs [où un séisme a fait plus de 300 morts en avril 2009], ce sont beaucoup de maisons anciennes qui se sont effondrées. Construites en pierres ou en moellons avec des appareillages en terre ou en argile, elles n’ont pas été conçues pour résister aux secousses sismiques. Mais du point de vue du contexte politique, cela n’a rien à voir : l’Italie est un pays riche, doté d’une véritable administration.

Par ailleurs, les secousses n’y ont pas été très fortes, même si un séisme commence à susciter des destructions à partir d’une magnitude de 6. Celui-ci, de 6,2, s’est produit de façon très localisée et a duré quelques secondes. En comparaison, ceux d’Haïti, du Népal, du Pakistan ont atteint des magnitudes de 7, voire 8… sans parler de la violence ni de la durée de celui du Japon de magnitude 9,2 qui a engendré le tsunami et la catastrophe nucléaire en 2011 !

En Italie, le séisme a touché de plein fouet trois villages qui ont beaucoup souffert. Mais malheureusement, il est survenu en pleine nuit. Voilà la principale raison pour laquelle il a causé autant de morts. Cela pourrait arriver pareillement en France : le Sud, le Sud-Est, l’Est connaissent une activité sismique… Dans cette partie de l’Europe, les gens ne sont pas habitués à ces phénomènes comme au Chili ou en Indonésie, où des séismes de cette force causent moins de victimes.

N’y a-t-il pas de progrès architecturaux en la matière ?

Si bien sûr. Pendant longtemps, le Japon avait des constructions très légères qui ne tuaient pas leurs occupants quand elles s’écroulaient. Mais le tremblement de terre de 1923 à Tokyo avait été suivi d’un incendie terrible qui a duré des semaines. A présent, le pays bâtit des immeubles en acier et en béton, souples et indestructibles. En France aussi, une maison récente de moins de dix ans, faite dans les règles de l’art, peut supporter un séisme classé 6 : elle s’en sortira avec des fissures.

On est capable de créer des bâtiments en acier et en béton qui bougent, se déforment, mais ne tombent pas. C’est une question d’argent car cela exige des matériaux de bonne qualité.

Mais comment protéger des cités anciennes ?

La présence d’un patrimoine historique complique la situation, mais n’empêche pas la prévention. Il est possible de renforcer les angles des bâtiments avec des structures métalliques. On peut démonter une partie des briques, couler un poteau, réappareiller avec des fibres composites, sans que cela ne se voie de l’extérieur. On peut le faire même sur une église. Il est aussi utile de vérifier l’état des fondations. Eventuellement on peut stabiliser le sol. Moyennant une bonne technicité, tout cela peut être masqué de l’extérieur.

Quant à la prévention des victimes, on parle aussi beaucoup de l’idée de mettre en place des poches de survie : les gens devraient pouvoir s’abriter chez eux dans un ou deux mètres carrés. On peut imaginer des meubles parasismiques solides…

Y a-t-il selon vous des erreurs à éviter dans l’après-catastrophe ?

Je suis pour ma part opposé à la création de camps transitoires qui sont stigmatisants pour les victimes. Dans un premier temps, les gens peuvent camper quelques semaines, on peut loger plusieurs familles dans des bâtiments publics aménagés pour leur offrir une certaine intimité. Puis il faut reconstruire. On peut le faire à l’identique, garder le patrimoine dans son environnement. Sauf sur une grosse faille évidemment.