Le premier ministre Manuel Valls, avec le secrétaire du parti socialiste Jean-Christophe Cambadelis, pendant le meeting de rentrée du gouvernement, lundi 29 août. | PASCAL PAVANI / AFP

Plusieurs ministres ont tenu, lundi 29 août au soir, à Colomiers, dans la Haute-Garonne, un meeting de rentrée, sous la pression de syndicats et sur fond de dissensions ouvertes au sein du gouvernement au sujet du burkini. Une rencontre sur le thème de la République, qui devait, après l’annulation de l’université d’été du PS à Nantes, faire figure de rassemblement de substitution pour la majorité.

Après les discours de Stéphane Le Foll (agriculture et porte-parole), Marisol Touraine (santé) et Najat Vallaud-Belkacem (éducation), le premier ministre, Manuel Valls, a clos le meeting vers 20 heures. ll a mis en garde contre la « menace considérable » que représente selon lui l’ancien président Nicolas Sarkozy, qui « impose » son agenda à la droite et qui « s’assoit sur les grands principes de la Constitution ».

Sur sa gauche, le chef du gouvernement a mis en garde contre « la surenchère des diviseurs », affirmant refuser de laisser la France « entre les mains des populistes et des démagogues » à la présidentielle de 2017.

« Tout refonder » en Europe

Il a également suggéré que la gauche européenne se batte pour l’assouplissement du pacte de stabilité, qui prévoit notamment que le déficit public d’un Etat soit inférieur à 3 % de son produit intérieur brut. « La gauche européenne, sociale-démocrate, doit se faire entendre davantage sur la relance économique, sur l’assouplissement des règles du pacte de stabilité, pour lutter contre le dumping social et la fuite fiscale, sur le dossier des travailleurs détachés », a-t-il dit.

Une partie de la gauche reproche au président François Hollande de ne pas avoir réussi à réorienter les règles budgétaires de l’Europe comme il l’avait promis pendant sa campagne en 2012, acceptant de fortes baisses de dépenses publiques et hausses d’impôt pour réduire le déficit.

A la suite du « Brexit », à la fin du mois de juin, M. Valls a dit à Colomiers qu’il fallait « tout refonder » en Europe. « Rebâtir des bases saines, revenir aux fondamentaux : protection et sécurité ; croissance et emploi ; gestion des grandes crises environnementales et migratoires ». « L’Europe est une belle idée : celle de la paix qui l’emporte sur la guerre, de l’union qui transcende les nationalismes », mais, a-t-il ajouté, « pour préserver l’essentiel, il nous faut tout changer ».

Les élus régionaux absents

Avant l’ouverture du meeting, à 18 heures, des ateliers de travail à huis clos avaient réuni les élus de la majorité, sous la protection d’un impressionnant dispositif de sécurité. Le thème de la réunion, choisi après l’attentat de Nice le 14 juillet, devait donner l’occasion de dire que « dans un contexte difficile sur le plan sécuritaire et économique, on reste fidèle aux valeurs essentielles que sont l’Etat de droit et le modèle social français », a dit un organisateur.

Le meeting ne devait pas faire le plein des élus de la région, la fédération socialiste de la Haute-Garonne étant l’une des plus critiques à l’égard de François Hollande. Pierre Cohen, ex-maire de Toulouse et proche de Martine Aubry, a annoncé qu’il ne serait pas de la partie, dénonçant une « politique gouvernementale déplorable tant sur le plan moral que social ». Le pôle des réformateurs, l’aile droite du parti, devait aussi faire défaut, au moins partiellement, ses chefs de file Jean-Marie Le Guen et Gérard Collomb ayant fait savoir qu’ils ne viendraient pas.

Rentrée du gouvernement : des centaines de personnes font un « contre-meeting »

Plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées lundi devant la mairie de Colomiers pour un « contre-meeting », à quelques pas du rendez-vous de rentrée du gouvernement. Une foule de 400 personnes, selon la police, dominée par une nuée de drapeaux syndicaux – Sud, CGT, FSU – et politiques – Lutte ouvrière, NPA, Jeunes communistes – s’est formée progressivement sur la place devant la mairie en fin d’après-midi.

« Non à la loi travail et son monde ! », disait une pancarte, quand une autre, en forme de cercueil, lançait : « Ci-gît le parti socialiste ». Une intersyndicale CGT-FSU-Solidaires-UNEF-FIDL-UET (Union des étudiants de Toulouse) avait en effet appelé à un « contre-meeting unitaire », rejoint par le NPA et des militants du Parti de gauche. Mi-août, la CGT avait qualifié de « provocation indécente » la tenue de ce meeting dans la ville natale de l’ancien leader syndical Georges Séguy, décédé récemment. 

« Ce qui est le plus détestable, c’est que [Manuel Valls] vient ici (...) au nom de la République, dans le pays de Jaurès, et que ce qu’il défend, lui, comme République est aux antipodes de ce que nous défendons en termes de fraternité et de justice sociale », a estimé Stéphane Boras, représentant Sud. Loi travail, licenciement d’un salarié d’Air France cet été : « Il y a un gros contentieux social avec ce gouvernement, ce qui justifie notre appel aujourd’hui, a estimé Jean-Philippe Gadier, membre du secrétariat départemental de la FSU. Même s’il y a moins de manifestants dans les rues, cela ne veut pas dire qu’ils sont satisfaits. Il reste une blessure béante. »