Jean-Pierre Chevènement arrive au ministère de l’intérieur, lundi 29 août, pour assister aux consultations sur l’islam lancées par Bernard Cazeneuve. | MATTHIEU ALEXANDRE / AFP

Jean-Pierre Chevènement est la cible de « procès d’intention fielleux (...) faits par quelques snipers de plume et de micro dont je suis la cible depuis très longtemps ». C’est en tous cas ce que l’ancien ministre de l’intérieur, très critiqué depuis qu’il a été choisi pour diriger la Fondation pour l’islam de France, affirme dans un long entretien accordé au Figaro du mercredi 31 août.

Revenant sur la polémique déclenchée par ses propos sur France Inter, lundi – « à Saint-Denis, par exemple, [il y a ] 135 nationalités, mais il y en a une qui a quasiment disparu » –, il assure que cette 136 nationalité manquante est « évidemment » la « classe ouvrière française ». Selon ses détracteurs, M. Chevènement accrédite ainsi la théorie d’extrême droite du « grand remplacement ».

« La plupart de ces critiques ont un arrière-plan politique : elles procèdent d’une philosophie communautariste que j’ai toujours combattue en tant que républicain laïc », réplique-t-il. Et pour lui, « les tenants du communautarisme (...) apportent leur aide » aux « théoriciens et [aux] stratèges de Daech [l’acronyme arabe de l’organisation Etat islamique] ». « Inconsciemment, je veux le croire », ajoute-t-il.

« Certaines de ces personnes s’estimaient sans doute aussi mieux qualifiées »

M. Chevènement laisse également entendre que les critiques à son encontre seraient liés à une forme de déception de personnalités musulmanes qui auraient souhaité obtenir son poste :

« Bien que la Fondation soit d’intérêt public et que son objectif ne soit nullement cultuel, certaines voix se sont élevées pour réclamer la nomination d’une personnalité musulmane. Certaines de ces personnes s’estimaient sans doute aussi mieux qualifiées. »

Depuis l’annonce de sa nomination par François Hollande, le 2 août, plusieurs apparitions médiatiques de M. Chevènement ont suscité la polémique. Le 15 août, réagissant à l’affaire du burkini dans Le Parisien, il conseillait aux musulmans « la discrétion » :

« Les musulmans, comme tous les citoyens français, doivent pouvoir pratiquer leur culte en toute liberté. Mais il faut aussi qu’ils comprennent que, dans l’espace public où se définit l’intérêt général, tous les citoyens doivent faire l’effort de recourir à la “raison naturelle”. »

#JeConnaisBienLeMondeMusulman

Lundi, une autre partie de son entretien sur France Inter, destinée à justifier la nomination contestée d’un non-musulman à la tête de la fondation, a provoqué des railleries sur les réseaux sociaux :

« Je connais bien le monde musulman. Je suis allé au Caire, à Alger, il y a quarante ou cinquante ans, la plupart des femmes ne portaient pas le voile. Mais il y a une tendance de fond qui correspond à la montée du fondamentalisme religieux. La majorité des femmes ne peuvent plus sortir dans la rue sans être voilée. Tout ça, ça traduit quelque chose qui se répercute aussi dans nos cités. »

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La phrase a donné lieu à un mot-dièse moqueur sur Twitter, #JeConnaisBienLeMondeMusulman. Et chacun d’y aller de sa justification la plus improbable possible : « je mange un kebab de temps en temps », « j’ai regardé Aladdin au moins deux fois », etc.

La Fondation pour l’islam de France, qui sera créée à l’automne, doit permettre de lever des financements pour des projets en matière profane (thèses de recherche sur l’islam, bourses d’études...). Laïcité oblige, le volet religieux (formation théologique des imams, construction de mosquées...) sera entre les mains d’une association cultuelle (loi de 1905) administrée par des musulmans.