Le nouveau président brésilien, Michel Temer, à sa cérémonie d’intronisation, à Brasilia, le 31 août. | UESLEI MARCELINO/REUTERS

Ses valises étaient déjà prêtes, ses rendez-vous, pris. « Tranquille », Michel Temer n’a jamais vraiment douté de devenir, mercredi 31 août, le nouveau chef d’Etat du Brésil. Seul l’inquiétait l’horaire de son intronisation afin de ne pas rater son avion pour la Chine. Laissant derrière lui l’étiquette du vice-président de Dilma Rousseff, une présidente qu’il n’a jamais appréciée – et réciproquement –, Michel Temer s’est envolé dans la soirée de mercredi vers Shanghai puis Hangzhou où il représentera le Brésil lors du sommet du G20, les 4 et 5 septembre. Il a déjà programmé là-bas des réunions bilatérales avec divers chefs d’Etat et de gouvernement tels l’Espagnol Mariano Rajoy et l’Italien Matteo Renzi. « Une preuve de la légitimité de Michel Temer », sourit son attaché de presse.

Ulcéré par le discours de Dilma Rousseff et de ses alliés le présentant comme un Rastignac monté sur le trône après un impeachment (destitution) aux allures de « coup d’Etat », le nouveau président a prévenu : « Les putschistes, ce sont eux. Nous ne laisserons pas cette insulte prospérer. » L’accession à la première marche du pouvoir, à 75 ans, est une aubaine pour celui qui se lamentait de n’être qu’un « vice-président décoratif ». Membre du Parti du mouvement démocratique brésilien (PMDB, centre), l’homme est ainsi passé du statut de politique « professionnel et anodin » que décrivait le mensuel Piaui en 2010, à celui d’homme d’Etat.

Aucun état de grâce

Aussi impopulaire que sa prédécesseur, cet habitué des coulisses de la politique se retrouve à la tête d’un pays endetté, plombé par la récession, le chômage et l’inflation. S’il est apprécié des milieux financiers, il ne lui sera accordé aucun état de grâce. Michel Temer doit réussir là où Dilma Rousseff a échoué. Son programme, dans l’immédiat, consistera à « corriger », résume son équipe. Corriger les erreurs qu’aurait commises la présidente destituée en creusant le déficit public. La priorité sera ainsi de passer en revue les programmes sociaux du Parti des travailleurs (PT) telle la « Bolsa Familia » (« bourse famille »), afin de mettre fin aux abus que le nouveau gouvernement aurait détectés, et remplir les caisses de l’Etat grâce à diverses privatisations.

Viendra ensuite le temps de la réforme des retraites et d’un code du travail poussiéreux. Un agenda impopulaire que le Congrès avalisera grâce à l’entregent de cet habile tacticien auprès des parlementaires, assure sa garde rapprochée. Reste à l’homme à se faire accepter des Brésiliens. En avril, ils étaient, dans les sondages, aussi nombreux (60 %) à réclamer le départ de Dilma Rousseff que le sien.

Dans un pays déchiré, fatigué d’une crise politique qui n’a que trop duré, atterré par les scandales de corruption, Michel Temer et son gouvernement devront surtout échapper à « Lava jato » (« lavage express »), l’enquête qui a révélé un système de pots-de-vin pharaonique impliquant le groupe pétrolier Petrobras, les géants du BTP et des politiques de tout bord. L’affaire a déjà provoqué des ravages au sein du PMDB, obligeant Michel Temer à se séparer de trois ministres de son gouvernement intérimaire, notamment son bras droit, Romero Juca.