Quatre à cinq ans d’emprisonnement, dont deux ferme, ont été requis à l’encontre des commissionnaires de l’hôtel des ventes. | FRANCOIS GUILLOT/AFP

La procureure Laura Tobelem a requis, jeudi 31 mars, des peines maximum de quatre à cinq ans d’emprisonnement dont deux ans ferme à l’encontre de la quarantaine d’anciens cols rouges de Drouot qui comparaissent devant le tribunal correctionnel de Paris pour vols, recel de vol et association de malfaiteurs. Elle a assorti ces réquisitions de peines d’amende, de saisies mobilières, de confiscation d’objets et d’une interdiction de séjour à l’hôtel Drouot pendant cinq ans. Le même quantum de peines a été demandé par la procureure à l’encontre des six commissaires-priseurs poursuivis pour recel de vol et association de malfaiteurs.

« Actes conscients, réfléchis » et collectifs

Dans son réquisitoire, la procureure a résolument écarté les images d’Epinal, les légendes et l’histoire de ces Savoyards « montés » à Paris comme l’avaient fait avant eux un père, un oncle, ou un aïeul, pour endosser le « col rouge » de Drouot. De l’appartenance à cette confrérie singulière, elle a au contraire retenu une circonstance aggravante. « Ils se sont targués d’appartenir à un monde qui avait ses codes, ses règles propres, comme s’il les exonérait de l’honnêteté. Comme s’ils évoluaient dans une bulle hermétique au simple bon sens », a-t-elle observé. Selon l’accusation, les vols reprochés aux commissionnaires sont des « actes conscients, réfléchis » et collectifs.

« Vous n’avez pas quelques individus à juger pour un vol mais bien un système fondé sur l’appât du gain. Un système par lequel les objets sont soustraits, transportés, stockés, vendus », a affirmé la procureure. « La décision de voler est collective, le mécanisme touche tout le monde, quels que soient l’âge ou l’expérience. Ils ont appris et compris en regardant faire les autres, et chacun touche sa part des gains », a-t-elle poursuivi.

Balayant l’argument selon lequel il n’y aurait eu que quelques « brebis galeuses » au sein de l’Union des commissionnaires de l’hôtel des ventes (UCHV), elle a au contraire estimé que cette société en nom collectif qui regroupait les cols rouges a « servi de support juridique au vol », notamment lorsqu’elle a décidé d’acquérir des containers individuels pour ses membres dans un entrepôt de Bagnolet. « Cette décision est ubuesque. L’objet de l’UCHV est de transporter des objets, pas de les stocker », a insisté Laura Tobelem, en demandant au tribunal de prononcer la dissolution de la société.

Un « système » qui (...) leur permettait de « rentabiliser la réservation des salles de Drouot »

La même sévérité s’est abattue sur les six commissaires-priseurs poursuivis pour association de malfaiteurs et recel de vol. Selon la procureure, ceux-ci n’ont pu ignorer la provenance suspecte des objets qui leur étaient proposés aux enchères par les commissionnaires et ont été eux aussi les bénéficiaires d’un « système » qui leur assurait « un fonds de roulement » et leur permettait de « rentabiliser la réservation des salles de Drouot ». Elle a toutefois renoncé à assortir ses réquisitions de peines – cinq ans dont trois avec sursis, 250 000 euros d’amende – d’une demande d’interdiction d’exercice professionnel.

« Je vous demande d’acter la fin d’un système », a conclu la procureure à l’adresse des juges.

Plaidoiries de la défense jusqu’au 4 avril.