Lucas Pouille lève les bras vers son clan. Il vient d’éliminer Rafael Nadal en huitième de finale de l’US Open (6-1, 2-6, 6-4, 3-6, 7-6 8/6) / AFP / Don EMMERT | DON EMMERT / AFP

« Lucas est jeune, mais il a déjà tous les coups du tennis dans son répertoire. Il a le potentiel pour être dans le top 10, il peut viser haut s’il arrive à continuer à progresser. » Ce genre de compliment est toujours agréable à entendre, encore plus quand il sort de la bouche de Rafael Nadal (n° 5). Défait par Lucas Pouille au terme d’un rude combat en cinq sets (6-1, 2-6, 6-4, 3-6, 7-6 8/6) dimanche en huitième de finale de l’US Open, l’Espagnol sait de quoi il parle.

A seulement 22 ans, le Français disputera, mardi 6 septembre, son deuxième quart de finale de suite dans un tournoi du Grand Chelem, moins de deux mois après Wimbledon. 25e joueur mondial au début du Grand Chelem américain, Lucas Pouille a connu une progression fulgurante ces derniers mois et fait désormais partie des meilleurs jeunes du circuit.

Des débuts discrets en junior

Né à Grande-Synthe (Nord), d’un père français et d’une mère finlandaise, l’actuel n° 4 français a débuté le tennis à l’âge de 8 ans et a vite été repéré par la Fédération française de tennis, qui lui a fait intégrer ses structures d’entraînement. En 2008, il est sacré champion de France de la catégorie des 13-14 ans, mais, à la différence des Monfils, Tsonga et bien d’autres avant eux, Pouille ne se fait pas un nom sur le circuit junior.

Son meilleur résultat est un quart de finale de l’Open d’Australie junior en 2011. Il commence alors à travailler avec Emmanuel Planque : celui-ci identifie rapidement le talent et, plus encore, la force de caractère de son élève. « Il ne me surprend pas, dans le sens où j’ai tout de suite senti qu’il était différent quand j’ai commencé à travailler avec lui, rappelle Emmanuel Planque. Il est intelligent, j’ai le sentiment qu’il ne fait pas deux fois la même erreur. »

Passé professionnel à l’âge de 18 ans, Pouille fait parler de lui pour la première fois deux ans plus tard, lors du Masters 1000 de Paris Bercy 2014. Il atteint alors les huitièmes de finale après avoir battu successivement, Steve Johnson (n° 41), Jarkko Nieminen (n° 69), Ivo Karlovic (n° 27) et Fabio Fognini (n° 20), seulement défait par Roger Federer, sur un score loin d’être ridicule, 6-4, 6-4.

Emmanuel Planque demande alors à Yannick Noah, dernier Français à avoir remporté un titre du Grand Chelem, de conseiller son joueur. « Manu m’a appelé un jour en disant : ça me ferait plaisir que tu viennes le voir de temps en temps. Mais je n’ai rien à voir dans cette victoire [contre Nadal] », s’empresse de faire remarquer le capitaine de l’équipe de France de Coupe Davis.

En 2015, il poursuit sa progression en atteignant pour la première fois le dernier carré d’un tournoi du circuit principal (ATP 250 d’Auckland) et fait son entrée dans le top 100 après un deuxième tour au Masters 1000 de Monte-Carlo, où il est corrigé par Rafael Nadal (6-2, 6-1).

« Il fait son boulot tranquillement. Il y a une forme de sérénité dans leur fonctionnement. C’est très agréable d’être avec lui. Il est surprenant de l’extérieur. Il a une forme de timidité, d’humilité, et dès que tu grattes un peu tu t’aperçois qu’il en veut. Il a les qualités des bons », résume Noah.

L’explosion en 2016

Depuis le début de l’année, Pouille s’est installé à Dubaï, pour pouvoir bénéficier, notamment, d’un climat favorable, qui attire les cadors, comme Federer qui vient s’y préparer en hiver. « On a tout changé depuis le début de l’année, j’ai mon propre préparateur physique, on travaille différemment, plus et mieux, il m’accompagne partout, ce qui fait que même en tournoi je continue de bosser ma condition physique, je suis plus fort, mentalement et physiquement », avance-t-il pour expliquer sa montée en puissance.

Ces changements paient rapidement. Il enchaîne les matchs et les résultats. En mars, au masters 1000 de Miami, il signe une première victoire contre un top 10, David Ferrer (n° 8) et confirme dans la foulée à Monte-Carlo face à Richard Gasquet (n° 10). En avril, il atteint sa première finale sur le circuit ATP à Bucarest, puis la demi-finale du Masters 1000 de Rome, après avoir une nouvelle fois sorti David Ferrer (n° 9).

Son parcours à Wimbledon jusqu’en quart de finale épate les observateurs et le propulse logiquement titulaire en équipe de France de Coupe Davis aux dépens de Gilles Simon, en panne de résultats probants. Face à la République tchèque, au mois de juillet, il démontre sa fiabilité en gagnant son premier match en bleu. Il permet même à la France de revenir à égalité (1-1) en battant Jiri Vesely.

Dimanche, Lucas Pouille a signé la meilleure performance de sa jeune carrière face à Rafael Nadal, avec un troisième rallye consécutif en cinq sets. « C’est un match qui va compter pour lui, dont il se souviendra toute sa vie. C’est impressionnant. C’est une belle progression. C’est notre joueur d’avenir », a commenté Yannick Noah, venu encourager son joueur en équipe de France dans les tribunes du court Arthur-Ashe. Travailleur acharné, Lucas Pouille ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Il n’a jamais caché ses ambitions d’intégrer le top 10 mondial. Une demi-finale d’un tournoi du Grand Chelem en serait la première étape.