Un champ d’éoliennes à Ashegoda en Ethiopie | DR

En ce 16 septembre, comme tous les ans, le succès du protocole de Montréal qui a donné un coup d’arrêt à la destruction de la couche d’ozone est mondialement célébré. Il y a en effet de quoi être fier de ce traité international. Depuis sa création en 1987, il a engagé l’élimination de plus d’une centaine de gaz qui détruisaient la couche d’ozone en incitant à l’utilisation de produits alternatifs : d’abord les HCFC( hydrochlorofluorocarbures), puis les HFC (hydrofluorocarbures). Or, si ces derniers n’abîment pas la couche d’ozone, ils sont malheureusement de très puissants gaz à effet de serre, pour certains jusqu’à plus de 20 000 fois plus nocifs que le CO2.

Il convient donc que les parties au protocole de Montréal décident enfin de les éliminer à leur tour, au nom cette fois, de la protection du climat ! L’enjeu est de taille surtout si l’on se souvient que l’Accord de Paris a fixé un objectif de réchauffement planétaire sous le seuil des 2 °C, et si possible des 1,5 °C, et qu’à ce jour les contributions nationales mettent le monde sur la voie d’un réchauffement de près de 3 °C.

Or, avec un réchauffement de 1,5 °C, les conséquences seront déjà désastreuses pour l’Afrique et plusieurs pays du continent y joueront leur survie. Plus que jamais, il faut trouver vite des solutions pour le monde entier et pour l’Afrique en particulier. C’est pour cette raison que le groupe africain s’est engagé de façon ambitieuse dans ces négociations.

Certes, il faut impérativement que les pays poursuivent et agissent sur les engagements de réduction de dioxyde de carbone qu’ils ont pris lors de l’Accord de Paris. Il faut également que les financements destinés à l’Afrique, promis dans le cadre de la COP21, soient débloqués rapidement et le plus directement possible vers les projets concernés. Mais l’urgence climatique est telle qu’il faut déployer tous les moyens possibles pour éviter d’accentuer le problème.

Une priorité de Barack Obama

Les HFC sont des polluants à courte durée de vie climatique : leur retrait de l’atmosphère entraînera donc une réponse climatique rapide. Pour rappel, les HFC sont utilisés principalement comme réfrigérants : air conditionné des voitures, climatiseurs individuels, réfrigération commerciale. Or, dans ce monde en réchauffement, la demande de froid ne cesse de progresser : les HFC sont en constante augmentation, à des rythmes de 10 à 15 % par an.

Si l’on ne fait rien, les HFC vont émettre 100 Gigatonnes d’équivalent CO2 d’ici 2050 et ajouteront 0,1 °C de réchauffement en 2050, et 0,5 °C de réchauffement en 2100. Plusieurs pays ont déposé (depuis 2009) des propositions d’amendement du protocole afin que ce dernier encadre la production et la consommation de HFC. Ces propositions d’amendement ne peuvent être adoptées qu’en présence d’un consensus. La réunion des ministres de l’environnement du continent Africain en 2015 et en avril dernier au Caire a renouvelé le mandat du groupe Afrique au sein du protocole de Montréal aux fins de continuer à négocier avec pour objectif de trouver un accord sur les HFC en 2016.

Les Africains souhaitent parvenir rapidement à un consensus. De leur côté, la Chine et les Etats-Unis ont réitéré publiquement le 2 septembre leur intention de travailler ensemble, concrètement, à un amendement ambitieux sur les HFC en 2016. L’élimination des HFC est une priorité du président Obama depuis longtemps. Les négociations progressent et de nombreuses réticences sont aujourd’hui gérées (notamment une exception pour les pays à climat très chaud qui estimaient que les produits alternatifs disponibles ne sont pas suffisamment efficaces aux températures qu’ils subissent).

Mais le succès n’est jamais acquis à l’avance et quelques points sont encore en suspens (date de gel de la production de la consommation etc..). La prochaine réunion des parties au protocole de Montréal qui pourrait aboutir à un accord se déroulera sur le sol africain, à Kigali à la mi-octobre. Il est urgent qu’un accord ambitieux y soit finalisé.

Ndiaye Cheikh Sylla, conseiller du ministre de l’environnement du Sénégal et négociateur du groupe Afrique au protocole de Montréal.