Nigel Farage, cofondateur du UKIP, à Londres, le 24 juin 2016. | TOBY MELVILLE / REUTERS

Le nom du successeur de Nigel Farage doit être annoncé vendredi 16 septembre. Moins de deux semaines après la victoire du Brexit et quatre jours après l’annonce de la démission de Boris Johnson, l’autre figure de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne avait créé la surprise en lâchant les rênes du United Kingdom Independence Party (UKIP – « Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni »), affirmant avoir atteint ses objectifs.

C’est à Bournemouth, sur la côte sud de l’Angleterre, que le UKIP – troisième force politique britannique après avoir obtenu le vote de 3,8 millions de Britanniques (12,6 % des votes mais un seul député) lors des législatives de mai 2015 – doit entériner en début d’après-midi cette succession, à l’occasion de son congrès annuel.

Pour les bookmakers, parmi les six candidats en course, Diane James, députée européenne et porte-parole du parti pour les questions de politique intérieure, est désormais la mieux placée pour diriger le parti. Elle devance largement les députés européens Jonathan Arnott et Bill Etheridge, la conseillère municipale Lisa Duffy, et les membres de la Commission nationale exécutive (NEC) du parti Elizabeth Jones et Phillip Broughton.

Turbulences

Mais cette succession a d’ores et déjà connu son lot de turbulences. Steven Woolfe, porte-parole du UKIP sur les questions d’immigration et député européen, faisait figure de favori mais n’a finalement pas pu concourir parce qu’il a remis sa candidature dix-sept minutes après l’heure limite fixée. La décision du parti de l’exclure de la course avait entraîné au début d’août la démission immédiate de trois de ses membres, qui considéraient qu’elle avait été dictée par la volonté des centristes du parti d’empêcher M. Woolfe de concourir alors qu’il était, selon eux, le plus populaire auprès des adhérents du parti.

« Si nous n’avons pas un candidat compétent et à l’aise avec les médias, ce pourrait bien être la fin du parti », avait alors mis en garde l’un des démissionnaires, Michael McGough.

Steven Woolfe avait en outre le soutien de Nigel Farage, cofondateur du parti (en 1993), et du principal pourvoyeur de fonds du UKIP, l’homme d’affaires Arron Banks, qui a jugé que cette décision s’apparentait à un « putsch » contre son protégé. En représailles, l’homme d’affaires pourrait porter un coup fatal à la formation politique. Selon le Times, en effet, il aurait l’intention de créer un nouveau mouvement politique de droite qui aurait pour base les partisans de la campagne non officielle favorable au Brexit, leave EU (« quitter l’UE »), emmenée par le UKIP.

« Un parti profondément divisé »

« L’avenir du UKIP est incertain », a estimé Matthew Goodwin, spécialiste du parti europhobe et anti-immigration à l’université de Nottingham et auteur de UKIP : Inside the Campaign (« UKIP : la campagne vue de l’intérieur »). « Après le vote en faveur du Brexit, le parti est devenu profondément divisé entre différentes factions et pourrait aussi avoir des difficultés à conserver un soutien populaire dans le nouveau paysage politique face aux conservateurs » emmenés par Theresa May, dont la politique a pris un virage plus « social », a-t-il déclaré.

Selon l’analyste, « le Parti conservateur semble désormais prêt à mener à bien le Brexit tout en offrant des politiques défendues depuis longtemps par le UKIP, comme la réintroduction des “grammar schools” , des écoles publiques qui sélectionnent les meilleurs élèves à l’entrée du secondaire ». En reprenant à son compte ce genre de réformes, Theresa May et son gouvernement ont  « réduit l’espace politique » du parti d’extrême droite.

Celui-ci espère néanmoins accroître sa popularité – et le nombre de ses députés – aux prochaines législatives de 2020 et ambitionne de devenir le parti officiel d’opposition à la place du Labour, actuellement en pleine tourmente. De plus, , selon M. Goodwin, si les négociations du Brexit n’aboutissent pas ou si le gouvernement échoue à réduire l’immigration, « alors il y aura certainement des opportunités à saisir pour un parti affirmant que la volonté du peuple a été ignorée ».