Alain Juppé, candidat à la primaire de la droite et du centre, en meeting en juillet 2016. | XAVIER LEOTY / AFP

Après l’école, l’université. Alain Juppé dévoile ses propositions pour l’enseignement supérieur, lundi 19 septembre lors d’une conférence à l’université de Cergy Pontoise. Le candidat à la primaire de la droite et du centre y défend une orientation « renforcée » à l’entrée à l’université mais refuse une véritable sélection. Il se démarque ainsi de son rival Nicolas Sarkozy, qui prône lui la liberté de sélectionner pour les universités. Une nuance qui a son importance, à l’heure où l’accès de tous à l’université est régulièrement remis en question, avec près de 40 000 étudiants supplémentaires qui rejoignent les amphis chaque année.

Une orientation « renforcée »

« Ce n’est pas tant l’absence de sélection qui est source d’échec que l’absence d’orientation », juge le maire de Bordeaux, pour qui « la sélection généralisée aboutirait à instaurer un numerus clausus limitant le nombre d’étudiants, ce qui serait en contradiction avec l’objectif d’un nombre plus important de diplômés de l’enseignement supérieur ».

« Si on ne peut ni ne doit limiter l’accès à l’enseignement supérieur, il faut le diriger, estime-t-il néanmoins. Il n’est plus possible de maintenir la situation actuelle où trop d’étudiants s’engagent à l’aveugle et sans le niveau requis pour suivre la formation qu’ils choisissent. » Tout étudiant n’aura « donc pas accès à n’importe quelle filière à l’université mais doit se voir proposer une formation adaptée à ses compétences et à ses goûts ».

Une proposition qui vise d’abord les bacheliers professionnels et technologiques : l’orientation de ces derniers en BTS et DUT, déjà privilégiée aujourd’hui, doit devenir encore « plus systématique », prévoit l’ancien Premier ministre, et des places doivent leur être réservées dans ces filières.

« Il est important aussi d’inciter les universités, comme elles le font déjà dans de nombreux cas, à créer pour les bacheliers qui ne sont pas aptes à suivre directement une filière générale, des filières de mise à niveau ou de propédeutique, dites « filières de réussite » », propose-t-il. Le choix d’orienter certains dans ces cursus serait laissé aux universités.

Mettre fin au tirage au sort

Alain Juppé s’attaque également aux difficultés rencontrées avec le système Admission post-bac (APB) et dénonce le tirage au sort pratiqué à l’entrée de certaines filières entre des candidats trop nombreux par rapport au nombre de places disponibles.

« L’affectation par la procédure APB a rendu encore plus brutal le processus d’orientation des élèves », juge-t-il. Et les « ajustements mis en place à la rentrée 2016 renforcent le caractère coercitif du système », sans pour autant « garantir la conformité de l’affectation avec le souhait des élèves ».

Il cite ainsi la nouveauté de la licence « libre » – c’est-à-dire l’obligation faite à tout bachelier général d’émettre au moins un vœu vers une filière non sélective et qui n’est pas parmi les licences universitaires en tension (droit, médecine, psychologie…). Un système qui « conduira mécaniquement à accroître le nombre d’affectations non désirées par les élèves, ce qui est trop souvent synonyme d’échec », déplore-t-il.

Pour mettre fin au tirage au sort, l’ancien premier ministre veut assurer une meilleure orientation en amont. Il propose notamment de faire démarrer le processus plus tôt, avec un entretien d’orientation personnalisé et systématique pour chaque lycéen pendant le premier trimestre de terminale, avec le professeur principal et un responsable issu de l’enseignement supérieur. Un exercice d’affectation APB « à blanc » dès l’année de première permettra de tester l’adéquation des vœux du lycéen, du projet et des possibilités que lui offrent ses résultats scolaires ou plus généralement son dossier, défend l’ancien premier ministre.

Une sélection généralisée en master

Alain Juppé prend en revanche clairement position en faveur de la sélection à un autre échelon d’orientation : le master. « La sélection sera généralisée dès le Master 1 », promet-il. Quant aux étudiants qui ne pourront pas « immédiatement poursuivre leurs études en master », ils « pourront revenir à l’université après quelques années d’expérience professionnelle », prévoit-il, en soutenant le développement de la formation continue.

Alain Juppé tranche un autre dossier sensible de l’enseignement supérieur : celui des droits d’inscription à l’université, que certains voudraient voir augmenter quand d’autres défendent le maintien de la quasi-gratuité de l’université.

Pour Alain Juppé, les droits en premier cycle « resteront définis par arrêté à un niveau modique pour ne pas peser sur les classes moyennes ». En revanche, « l’Etat donnera, à l’intérieur d’une fourchette, la liberté aux universités de fixer ces droits, afin qu’elles puissent les augmenter dans leurs formations sélectives, telles que les masters, doctorats ou les écoles d’ingénieurs ». Soit encore une légère différence avec Nicolas Sarkozy, adepte lui de donner la liberté aux établissements de fixer leurs droits d’entrée, dans le cadre d’un plafond décidé par l’Etat.