Manuel Valls à l'Assemblée, le 6 avril. | PATRICK KOVARIK / AFP

Initialement prévue le mercredi 6 avril, la présentation du projet de loi égalité et citoyenneté en conseil des ministres a été reportée d’une semaine par le gouvernement. Inspiré des comités interministériels lancés par Manuel Valls après les attentats de janvier 2015, il est présenté comme une réponse à « l’apartheid territorial, social et ethnique » évoqué par le premier ministre le 20 janvier lors de ses vœux à la presse.

Organisés en mars et octobre 2015, les comités interministériels ont donné naissance à 65 mesures destinées à répondre aux malaises de la société française mis en évidence par les attentats contre Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher. Les domaines concernés : l’école, le logement, l’emploi, la laïcité, la lutte contre les discriminations, la citoyenneté ou encore la mixité. Vaste programme, qui comprend des mesures plus ou moins précises, et à l’avancement plus ou moins engagé, allant de la réserve citoyenne à la prévention de la radicalisation en passant par la lutte contre le décrochage scolaire.

Avant d’être présenté au comité interministériel prévu le 13 avril, le projet de loi, qui doit venir « renforcer les 65 mesures » issues des deux premiers comités, passera en conseil des ministres. Un texte qui s’articulera autour de la mixité sociale, de la langue française, de la lutte contre les discriminations et du « projet républicain ».

Quatre thématiques pour un projet de loi

Pour favoriser la mixité sociale, le gouvernement prévoit notamment d’autoriser les organismes HLM à moduler les loyers au sein d’un même immeuble. Les préfets devraient également avoir plus de pouvoir pour faire respecter la loi SRU, qui impose des quotas de logements sociaux dans les communes. Des « délégués du gouvernement » pourraient aussi être chargés d’assurer l’application des politiques publiques dans les quartiers prioritaires.

Au cœur du volet « projet républicain », la réserve citoyenne et le service civique devraient être généralisés. Le service civique, qui offre « l’opportunité de s’engager, de donner de son temps à la collectivité et aux autres », contre rémunération, devrait être étendu à de nouvelles structures. Aujourd’hui proposé par des associations et collectivités, il pourrait aussi être mis en place dans des entreprises du secteur public comme la SNCF ou encore chez les pompiers. A partir de septembre 2016, un « livret citoyen » pourrait aussi être créé pour retracer les engagements des jeunes.

Au chapitre « lutte contre les discriminations », le projet de loi devrait élargir l’accès à la fonction publique mais aussi faciliter la répression des délits de discrimination. Concernant la langue française, des dispositifs de lutte contre l’illettrisme et l’analphabétisme seront présentés.

Ce qu’ont proposé les internautes

Depuis le 23 mars, le gouvernement a également ouvert une consultation citoyenne sur Internet en vue du prochain comité interministériel Egalité et citoyenneté. Censée s’achever mercredi, elle a été prolongée jusqu’à vendredi à midi. Autour de huit problématiques, les internautes ont été invités à proposer, commenter et voter des mesures. Au total, plus de 1 500 propositions ont été formulées, et environ 9 000 votes enregistrés. Les huit propositions ayant recueilli le plus de voix seront présentées au gouvernement lors du comité du 13 avril. Sélection de quelques-unes de ces contributions.

  • Comment donner aux citoyens les moyens de lutter contre le racisme et les discriminations ?

Proposée par l’association Coexister, qui défend le pluralisme culturel en France, l’idée d’une « formation universelle à la laïcité et aux faits religieux dans les universités » a recueilli le plus de votes. L’objectif : faire comprendre ce qu’est la laïcité et enseigner les bases de l’histoire des religions. Parmi les autres propositions : l’instauration du CV anonyme, le droit de vote des étrangers aux élections locales ou encore l’anonymisation des demandes pour un logement social.

  • Comment faciliter l’insertion professionnelle des jeunes diplômés des territoires en difficulté ?

En tête du classement : « le Club sésame et talents ». Par promotion de 50, des « jeunes diplômés résidant dans les quartiers prioritaires » seraient parrainés par des personnalités et accompagnés par des dirigeants d’entreprise pour les aider à s’insérer dans le monde du travail. De nombreux internautes suggèrent de « développer les stages ». Un autre, plus original, a imaginé instaurer des échanges entre des collèges de « quartiers aisés et en difficultés ».

  • Comment permettre à ceux qui n’ont ni réseaux ni financements, de créer leur entreprise ?

C’est un « pack démarrage PME » qui recueille le plus de votes. Premier aspect de la proposition : une fiscalité très avantageuse avec une réduction de 100 % d’impôts pour les entreprises de moins de dix salariés. L’internaute conseille ensuite de développer les centres de formalités des entreprises, qui aident pour toutes les démarches administratives de création d’entreprise (CFE), ou encore de mettre à disposition des locaux, comme des lycées techniques, le soir et le week-end.

  • Comment simplifier les dispositifs pour permettre aux jeunes d’accéder pleinement à leurs droits ?

C’est la « généralisation des conseils des jeunes sur tout le territoire » qui arrive en tête. La proposition a déjà été remise à Patrick Kanner, ministre de la ville, le 18 mars par des conseillers jeunes. Ils demandent que ces conseils consultatifs soient généralisés partout en France et transformés en « instances réelles de démocratie participative, des instances où les jeunes ont les moyens de se faire entendre auprès de leurs élus ». Autre proposition, émise par la Fédération des associations générales étudiantes, qui avait appelé à la mobilisation pour la première journée de manifestation contre la loi travail : la création d’un guichet numérique unique d’information et d’accès aux droits pour les jeunes.

  • Comment concilier vie professionnelle et activités bénévoles ?

« Chaque bénévole, peu importe son âge, ayant une lettre de mission de son association devrait pouvoir obtenir six jours de congé sans solde supplémentaire, opposable à l’employeur, pour pouvoir exercer ses responsabilités bénévoles », explique l’internaute qui recueille le plus de voix. Autres propositions : l’instauration d’un revenu de base inconditionnel ou encore la création d’une monnaie, la « monnaie d’estime », « accordée à toutes personnes qui contribuent à la vie de la communauté ».