Le ministre français des affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault, le 19 septembre à New York. | TIMOTHY A. CLARY / AFP

La réunion avait été annoncée à grand bruit par les Nations unies, elle devait marquer un temps fort de cette Assemblée générale. Mais le sort des 65 millions de déplacés, dont 21 millions de réfugiés, est ironiquement éclipsé par la crise syrienne, responsable de l’exil de quatre millions de Syriens, et par les tensions russo-américaines qui culminent pendant ce grand raout de la diplomatie mondiale.

L’intention est louable : les 193 Etats membres de l’ONU se sont mis d’accord sur une déclaration politique, dans laquelle ils s’engagent à assurer une meilleure protection aux réfugiés, et à aider les pays débordés par l’accueil des migrants, notamment la Jordanie et le Liban, qui arrivent au point de rupture. Il y a urgence. Le Soudan du Sud est ainsi devenu la semaine dernière le cinquième pays à compter plus d’un million de déplacés. Le haut-commissaire aux droits de l’homme, Zeid Raad Al-Hussein, de plus en plus critique sur l’incapacité des Etats membres à s’entendre sur une politique migratoire, a donc promis dans son discours d’ouverture que ce sommet ne serait pas celui de « l’autocongratulation ».

Las. Faute de réelle volonté politique, ce sommet reste aux yeux des ONG comme celui des occasions manquées. Le document de vingt-deux pages adopté énumère des propositions pour assurer « les droits fondamentaux de tous les réfugiés et les migrants », notamment sur les questions de santé, d’éducation, de droit au travail et de non-séparation des familles. Mais ces dispositions n’ont aucun caractère obligatoire.

« Il aurait fallu engager les Etats sur des décisions contraignantes. Mais on va essayer de rester un peu optimiste et espérer que les Etats membres réalisent l’ampleur de ce qui se passe et considèrent la migration sous un angle non pas gestionnaire mais humain », estime la docteur Françoise Sivignon, la directrice de l’organisation Médecins du monde, qui rappelle que 50 % des réfugiés sont des femmes et des enfants, souvent en état de détresse psychologique grave.

Contribution chinoise

Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, qui préside sa dernière Assemblée générale après deux mandats, avait espéré mobiliser autour d’un pacte mondial, qui prévoyait l’accueil de 10 % des réfugiés chaque année. Mais les Etats ont préféré renvoyer la question à 2018, incapables de s’entendre sur cette proposition ambitieuse.

« La crise est historique, mais la réponse pour l’instant ne l’est pas », constate Philippe Bolopion, de l’organisation Human Rights Watch. « Il n’est jamais trop tard pour qu’un certain nombre de pays se montrent à la hauteur. Sans cela, l’histoire les jugera durement. » Le rare engagement concret de cette journée est venu de la Chine, qui utilise habilement la diplomatie du « soft power » pour s’imposer sur la scène internationale. Le premier ministre, Li Keqiang, a annoncé une contribution de 100 millions de dollars (89 millions d’euros) pour l’aide humanitaire aux réfugiés.

Le président américain, Barack Obama, tentera de traduire en actions concrètes ces déclarations, en organisant dès mardi 20 septembre un sommet des donateurs : quelque quarante-cinq pays sont réunis pour collecter trois milliards de dollars d’aide humanitaire. Mais M. Obama, dont le pays n’a accueilli que 10 000 réfugiés syriens pour l’année fiscale 2016, aura du mal à convaincre ses pairs de sa crédibilité sur le dossier.