Manifestation contre le projet d’oléoduc Keystone XL, à Washington, le 6 novembre 2015. | ANDREW CABALLERO-REYNOLDS / AFP

Une cinquantaine de « premières nations » – peuples autochtones – du Canada et des Etats-Unis ont décidé de s’unir pour combattre « l’expansion des sables bitumineux » dans l’ouest du Canada. Le geste est qualifié d’historique. Le « traité autochtone », qui a fait l’objet d’une signature publique à Montréal le 20 septembre, engage les premières nations concernées à « interdire » l’utilisation de leurs territoires pour des projets facilitant le développement de la production de pétrole issue des sables bitumineux d’Alberta et de Saskatchewan, incluant le transport par oléoduc, par train ou par bateau.

Cette production devrait, rappellent les chefs autochtones, connaître une hausse de plus de 40 % d’ici à 2025. De 2,4 millions de barils par jour actuellement, elle passerait ainsi à 3,4 millions. Pour l’écouler, l’industrie canadienne aura besoin d’oléoducs et d’une intensification des convois ferroviaires, avec tous les risques d’accidents et de déversements inhérents.

Les représentants des groupes autochtones du Canada, mais aussi de plusieurs Etats américains comme le Dakota du Nord et le Minnesota, s’opposent depuis longtemps à la construction d’oléoducs comme Keystone XL, Kinder Morgan ou Energie Est. Barack Obama a mis son veto, en novembre 2015, au pipeline Keystone XL qui devait acheminer du pétrole de l’Alberta vers le Texas, mais rien ne dit que son successeur poursuivra sur la même voie.

Dans l’ouest canadien, les premières nations bataillent contre le projet de Kinder Morgan d’acheminer le pétrole d’Alberta vers le Pacifique. Celles du Minnesota s’inquiètent de l’expansion d’un oléoduc de la compagnie canadienne Enbridge, tandis que celles du Québec se battent contre le projet Energie Est, censé permettre l’arrivée du pétrole par oléoduc d’Alberta vers la côte est-canadienne, via le Québec.

Cette entente n’est que « le commencement d’une longue lutte », a prévenu le chef de l’Assemblée des premières nations du Québec et du Labrador, Ghislain Picard, ajoutant que c’était aussi « la preuve que, au-delà de nos divergences, nous pouvons travailler ensemble pour un objectif commun ». De son côté, Stewart Phillip, le président de l’Union des chefs indiens de la Colombie-Britannique, a estimé que les infrastructures de type oléoduc sont « irresponsables et incompatibles avec les objectifs du Canada de réduire ses émissions de gaz à effet de serre ».

La nouvelle alliance autochtone jette un pavé dans la mare des promoteurs d’oléoducs comme Enbridge et TransCanada, mais aussi du gouvernement canadien qui devra in fine en autoriser ou non la construction dans les prochains mois.