Le ministre de l’économie et des finances, Michel Sapin, revendique le « principe de responsabilité » et maintient l’objectif de ramener le déficit public de la France à 2,7 % du produit intérieur brut (PIB) en 2017. | ODD ANDERSEN / AFP

Nul doute que le dernier projet de loi de finances (PLF) du quinquennat, présenté mercredi 28 septembre, donnera lieu à une furieuse foire d’empoigne entre la majorité de gauche sortante et l’opposition de droite, qui aspire à redevenir majoritaire en 2017. Les protagonistes ont déjà planté le décor. Le ministre de l’économie et des finances, Michel Sapin, revendique le « principe de responsabilité » et maintient l’objectif de ramener le déficit public de la France à 2,7 % du produit intérieur brut (PIB) en 2017.

« Salades », « bidon », « bricolage », « bidouillage » et autres amabilités rétorquent les principaux candidats de la droite, lancés dans une primaire interne, qui dénient toute crédibilité à ce budget et s’apprêtent, quant à eux, à recreuser les déficits, en en imputant la faute à l’« héritage » laissé par l’actuelle majorité.

Là-dessus, le Haut Conseil des finances publiques (HCFP), autorité chargée d’évaluer le réalisme des prévisions du gouvernement, leur apporte de l’eau au moulin en jugeant « improbable » l’objectif du gouvernement.

Le mot a fait mouche et M. Sapin l’a prise (la mouche). « Cet engagement, nous le tiendrons. Certains le jugent “improbable”. Pourtant, nos résultats passés nous confortent dans notre confiance, riposte-t-il, rappelant les critiques du même HCFP à l’encontre du PLF 2015. Ce qui était hors d’atteinte fut atteint. Ce qui est improbable sera prouvé. »

« Si demain chacun fait preuve du sérieux budgétaire dont nous avons fait preuve », prend-il soin d’ajouter, car, dans tous les cas de figure, les cartes budgétaires seront rebattues à l’issue des élections présidentielle et législatives.

C’est en quelque sorte un budget « Canada dry » qui, pour l’heure, est mis sur la table : il a toutes les apparences du sérieux mais il contient pas mal d’adjuvants. Il table sur une croissance de 1,5 % en 2017, mais la plupart des organismes de conjoncture anticipent un résultat inférieur.

Le déficit de l’Etat reste stable

Si le déficit de l’ensemble des administrations publiques est prévu à 2,7 %, soit une baisse de 2,1 points par rapport au début du quinquennat, l’Etat présentera, lui, un solde négatif de 69,3 milliards d’euros (– 3 %), quasiment identique au déficit prévisionnel de 2016, 69,9 milliards (– 3,3 %). Le déficit de l’Etat était de 3,9 % en 2012.

La réduction du déficit public aura en grande partie reposé sur les efforts de la Sécurité sociale et des collectivités territoriales.

Hausse des dépenses publiques

La part des dépenses publiques dans le PIB s’établit à 54,6 %. Une baisse continue depuis 2012 – ce taux était alors de 56 % – revendique le gouvernement, rappelant que, depuis le début du quinquennat, la hausse moyenne des dépenses publiques en valeur aura été de 1,3 % par an alors qu’elle était de 3,6 % par an entre 2000 et 2012.

« Au total, nous aurons réalisé 46 milliards d’euros d’économies entre 2015 et 2017 », affirme M. Sapin. Un montant qui laisse sceptique.

Le budget 2017 prévoit une hausse de 1,6 % des dépenses publiques en valeur, après 1,4 % en 2016.

Des recettes nouvelles

Au total, le gouvernement devait trouver 14 milliards d’euros pour financer les mesures nouvelles annoncées ces derniers mois. La « sphère sociale » y contribuera pour 1,5 milliard d’euros : réduction de niches sociales, hausse de l’imposition du tabac à rouler et imposition des distributeurs de tabac, produit en hausse de la lutte contre la fraude, économies sur la gestion des caisses, et « moindres dépenses » prévues sur certaines réformes comme celles du capital décès ou de l’allocation congé parental.

L’Etat, quant à lui, prévoit d’engranger 1,3 milliard d’euros de recettes supplémentaires. L’accélération du paiement de l’impôt sur les sociétés pour les plus grandes entreprises rapportera à elle seule 530 millions d’euros.

S’y ajoutent des mesures sur les produits d’épargne, concernant la taxe sur les surfaces commerciales ou la taxe sur les véhicules de société ainsi que sur le plafonnement de l’impôt de solidarité sur la fortune.

Sont également prévues, pour 1,2 milliard d’euros, des mesures de régulation du programme d’investissements d’avenir.

Le budget 2017 compte également sur des rentrées supplémentaires grâce, notamment, aux recettes engendrées par la lutte contre la fraude fiscale. Le gouvernement pense pouvoir réviser à la baisse de 1 milliard d’euros l’évolution des dépenses locales en 2017.

Des mesures à un coup

Enfin et surtout, la réorientation du pacte de responsabilité – substituant aux baisses d’impôts prévues une hausse du crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) qui s’imputera budgétairement en 2018 et non en 2017 – permet de libérer 5 milliards d’euros de marge.

Au total, le gouvernement affiche donc 13,8 milliards d’euros de recettes supplémentaires ou de moindres dépenses, qui couvrent quasiment les 14 milliards d’euros de dépenses nouvelles.

Ce sont, pour l’essentiel, des mesures à un coup. Mises bout à bout, cela fait effectivement « la maille » mais tout cela ressemble quand même à un assemblage de bric et de broc. Tout en affichant une volonté de sérieux budgétaire, il n’est pas certain, dans ces conditions, que le gouvernement parvienne à lever les doutes sur la crédibilité de ses objectifs.