Le PDG de Wells Fargo, John Stumpf, devant la commission des finances de la Chambre des représentants, le 29 septembre. | MARK WILSON / AFP

Les excuses suffiront-elles à éteindre l’incendie ? Devant une commission des finances de la Chambre des représentants particulièrement remontée, John Stumpf, le PDG de Wells Fargo, a tenté, jeudi 29 septembre, d’apaiser la colère qui monte aux Etats-Unis à propos de ses pratiques commerciales agressives. La première banque américaine en termes de valorisation boursière a ouvert illégalement 1,5 million de comptes et attribué plus de 500 000 cartes de crédit à l’insu de ses clients dans le but d’atteindre les objectifs de vente fixés par la direction.

Lors d’une audition qui a duré quatre heures, M.Stumpf s’est dit « profondément désolé » et « pleinement responsable » pour des pratiques. Celles-ci avaient été sanctionnées le 8 septembre par une amende de 185 millions de dollars, versée au Bureau américain de protection des consommateurs, l’OCC, l’un des régulateurs bancaires, et à la ville de Los Angeles.

Depuis, le PDG est soumis à une intense pression. Mercredi, le conseil d’administration de la banque a décidé de le priver de 41 millions de dollars de stock-options, tout en l’obligeant à renoncer à tout salaire pendant le déroulement de l’enquête interne. Sur la période pendant laquelle ces objectifs commerciaux ont été appliqués, entre 2011 et 2016, le patron a reçu un total de 142,5 millions dollars sous forme de stock-options.

Le même jour, l’Etat de Californie a annoncé la rupture de ses liens d’affaires avec Wells Fargo, qui a été souvent sa banque conseil lors de ses émissions d’obligations. Alors que le PDG avait déjà passé une première audition le 20 septembre devant le Sénat, de plus en plus de parlementaires demandent des comptes, pointant du doigt le fait que certaines pratiques des banques n’ont guère évolué depuis la crise financière.

« Comment vous allez vous maintenir à votre poste »

Cette affaire arrive au plus mauvais moment pour M. Stumpf, alors que la campagne électorale crée un climat propice à une surenchère pour condamner les excès de la finance. Ainsi la totalité des 59 membres de la commission des finances de la Chambre des représentants remettent en jeu leur mandat le 8 novembre. Les uns et les autres n’ont pas eu de mots assez durs à l’encontre du PDG. « Vous devriez avoir honte de vous-même », lui a lancé le représentant démocrate de Géorgie, David Scott. Pour le président de la commission, le républicain du Texas, Jeb Hensarling, cette affaire à des airs de « déjà-vu pour les Américains : des entreprises sont impliquées dans des activités épouvantables. Cela fait les gros titres et cependant personne ne semble tenu pour responsable ».

L’affaire avait été révélée par une enquête du Los Angeles Times, en décembre 2013. M. Stumpf affirme qu’il n’avait été mis au courant que quelques semaines avant et que le manque d’éthique était circonscrit à 5 300 employés, licenciés depuis. Un sens des responsabilités critiqué par certains, comme le représentant démocrate du Texas, Al Green, qui estime que ces derniers peuvent être considérés comme des victimes d’un système décidé par leur hiérarchie. « Ces gens essayaient de gagner leur vie. Ils méritent justice, pas seulement de se faire virer de votre entreprise », a-t-il dit. M. Stumpf a promis que les responsabilités de tous les hauts dirigeants seraient « passées à la loupe ».

Maxine Waters, une démocrate de Californie s’est interrogée sur la capacité de M. Stumpf à contrôler une entreprise de la taille de Wells Fargo. « Savez-vous réellement ce qui se passe dans cette banque ? », s’est-elle agacée, critiquant le fait que le PDG siège parallèlement au conseil du distributeur Target ou du pétrolier Chevron. « Wells Fargo devrait être démantelé, c’est trop gros à gérer », a-t-elle tranché. Enfin, son collègue de l’Etat de Washington, Dennis Heck, a accusé le PDG d’être dans le déni. « Personnellement, je ne vois pas comment vous allez vous maintenir à votre poste », lui a-t-il lancé, rejoignant ainsi la sénatrice du Massachusetts, Elizabeth Warren, qui, la veille, avait appelé à la démission de l’intéressé. « Je me tiens à la disposition du conseil d’administration » a affirmé ce dernier jeudi.