Le vice-président du Conseil d’Etat, Jean-Marc Sauvé, revient pour la première fois sur les raisons qui ont poussé la plus haute juridiction administrative à suspendre des arrêtés municipaux antiburkini, dans une interview accordée au Figaro, mardi 4 octobre. Une décision juridique saluée par certains mais vivement critiquée par d’autres.

Expliquant que, pour se prononcer sur cette affaire, le Conseil d’Etat a dû se pencher sur la conciliation de « deux grands principes » – le respect des libertés garanties par la loi et la prévention des atteintes à l’ordre public –, M. Sauvé rappelle que « le Conseil d’Etat n’a relevé aucun risque avéré d’atteinte à l’ordre public à Villeneuve-Loubet ni à Cagnes-sur-Mer. Il a donc suspendu les mesures d’interdiction du burkini. »

Sur la question de l’ordre public, qui, au-delà de la notion de la prévention des atteintes aux personnes, recouvre aussi la notion de dignité humaine, M. Sauvé estime que « le port d’un vêtement ne peut être regardé comme portant par lui-même atteinte à l’égalité entre hommes et femmes ».

La question de la soumission de la femme

Interrogé sur la question de la soumission de la femme que représente, pour certains, cette tenue de bain islamique, M. Sauvé estime que « le Conseil d’Etat ne peut se livrer à cette interprétation du port du burkini, qui serait trop empreinte de subjectivité ». Et d’ajouter :

« On ne peut affirmer que le port du burkini porte une atteinte à l’égalité hommes-femmes si radicale et manifeste qu’il doive être prohibé. En outre, dans bien des cas, il résulte d’un choix volontaire. Le principe d’égalité entre hommes et femmes est un principe absolu, mais déduire du port d’un maillot de bain une violation de ce principe serait s’engager sur un terrain juridiquement fragile. »

M. Sauvé souligne aussi que la juridiction administrative « ne peut évidemment pas, en faisant prévaloir une morale déterminée, édicter des normes sur ce que doit être un costume de bain ».