Le président colombien Juan Manuel Santos (à droite) serrant la main de son prédécesseur Alvaro Uribe lors d’une rencontre entre les deux hommes au palais présidentiel, à Bogotá le 5 octobre. | CESAR CARRION / AFP

Le président colombien, Juan Manuel Santos, et son prédécesseur (2002-2010), devenu chef de file de l’opposition, Alvaro Uribe, se sont entretenus mercredi 5 octobre en vue de régler leurs différends sur l’accord de paix avec la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC). Ce texte avait été rejeté, dimanche, par une courte majorité lors d’un référendum.

Les deux hommes, qui ne s’étaient pas rencontrés depuis 2010, se sont engagés à mettre fin au conflit armé avec les rebelles marxistes qui dure depuis 52 ans. A l’issue d’un entretien de plus de trois heures, Alvaro Uribe a souligné la nécessité d’« ajustements et de propositions qui doivent être introduites (…) pour rechercher un nouvel accord de paix qui inclura tous les Colombiens ». Le président Santos s’est montré disposé à apporter des changements à l’accord, a-t-il ajouté, sans évoquer de proposition précise.

« Nous avons identifié que nombre de leurs inquiétudes viennent de points qui nécessitent des clarifications ou des précisions. Aujourd’hui nous commençons à travailler avec eux pour renforcer ces points et lever leurs doutes », a déclaré pour sa part le chef de l’Etat dans un bref communiqué. « La paix en Colombie est proche et nous allons l’atteindre », a-t-il promis.

Les FARC toujours engagées pour la paix

M. Santos s’était auparavant entretenu avec un autre ex-président, Andrés Pastrana (1998-2002), promoteur des dialogues du Caguan, précédente tentative de paix avec les FARC. A sa sortie, M. Pastrana a déclaré avoir demandé la mise en place « immédiate » des zones où les rebelles doivent se rassembler pour déposer leurs armes, sous supervision des Nations unies. Selon lui, cela donnerait aux « guérilleros la tranquillité que nous allons avancer dans ce processus ».

Le chef de l’Etat a reçu ses adversaires pour tenter de sauver l’accord négocié pendant près de quatre ans à Cuba avec les rebelles marxistes, et qui prévoyait notamment leur désarmement et leur reconversion en parti politique légal.

Les FARC ont pour leur part réitéré leur souhait d’en finir avec la confrontation armée, annonçant sur Twitter qu’elles « maintenaient leur volonté de paix ». La veille pourtant, M. Santos a posé la date limite du 31 octobre au cessez-le-feu, à l’origine définitif, qu’il avait décrété le 25 août, au lendemain de la conclusion de l’accord.

« Et ensuite la guerre continue ? », s’est interrogé le chef de la guérilla marxiste Timochenko sur Twitter. Un autre chef guérillero, Pastor Alape, a appelé les rebelles à « se déplacer vers des positions sûres pour éviter les provocations ».

Toutefois, le ministre de la défense, Luis Carlos Villegas, a temporisé :

« Le cessez-le-feu bilatéral sera prorogé autant que nécessaire pour préserver la sécurité des Colombiens, de la force publique, des zones où sont concentrées les FARC et des membres de cette organisation. »

« Ce qui nous unit et ce qui nous sépare »

Des milliers de partisans de la paix avec la guérilla marxiste des FARC ont manifesté, le 5 octobre, devant le palais présidentiel à Bogotá le 5 octobre. | GUILLERMO LEGARIA / AFP

La crise suscitée par le référendum du 2 octobre semble provoquer un sursaut des milieux universitaires et de gauche. Des rassemblements pour la paix ont été organisés dans une douzaine de villes du pays.

A Bogotá, une marche blanche a rassemblé environ 30 000 personnes, bougies et fleurs à la main. « Pour tout ce qui nous unit et tout ce qui nous sépare », pouvait-on lire sur une pancarte en tête du cortège, qui s’est étiré en silence sur plusieurs kilomètres jusqu’à la place Bolivar, cœur de la capitale où se trouve le palais présidentiel. Parmi les manifestants, certains portaient les photographies de leurs proches, qui furent victimes de la guerre civile.

Le complexe conflit colombien a impliqué au fil des décennies guérillas d’extrême gauche, milices paramilitaires d’extrême droite et forces armées, faisant plus de 260 000 morts, 45 000 disparus et 6,9 millions de déplacés.