La piscine Apirant-Dunand, dans le 14e arrondissement. | R. LESCURIEUX/MAIRIE DE PARIS

C’est une petite révolution dans la façon de chauffer l’eau d’un bassin qu’est en train de vivre la piscine Aspirant-Dunand, dans le 14e arrondissement de Paris. Mercredi 5 octobre a été inauguré un nouveau dispositif, expérimenté depuis quelques mois, de récupération de chaleur de cet équipement municipal qui jusque-là se chauffait intégralement à l’électricité.

Désormais, l’eau des bassins et des douches de cette piscine fréquentée chaque année par près de 130 000 personnes est chauffée grâce à un mécanisme de captation de la chaleur provenant des eaux des égouts, dont la température oscille entre 13 °C et 20 °C tout au long de l’année en raison de la chaleur des eaux évacuées par les sanitaires et les équipements domestiques.

Le principe de récupération de cette chaleur est assimilable à une géothermie « basse température ». Les calories sont récupérées par des plaques métalliques installées dans les égouts situés sous la piscine, sur lesquels circulent les eaux. Des pompes à chaleur permettent ensuite de porter à la température voulue les bassins et les douches de la piscine Aspirant-Dunand (respectivement 26°C et 35°C). Partenaire de la mairie de Paris sur ce projet, Suez Eau France a déjà développé, depuis 2010, ce type d’installations sur une douzaine de sites en France : piscines, écoles, équipements collectifs, etc.

Baisse de moitié des besoins en électricité

Ce dispositif innovant devrait permettre à cet établissement municipal de diminuer de moitié ses besoins en électricité pour se chauffer, qui s’élevaient jusqu’à présent à 1 310 mégawattheures (MWh) par an. Il a pour autre conséquence notable d’entraîner une réduction des émissions de gaz à effet de serre de l’établissement de 46 tonnes équivalent CO2, soit une baisse de 30 %.

La perspective pourrait s’avérer intéressante pour le parc des 39 piscines qui couvrent le territoire parisien. « Les piscines sont les équipements publics les plus énergivores, car il faut non seulement chauffer l’air et l’eau, mais aussi ventiler l’atmosphère », réagit l’adjoint chargé des sports, Jean-François Martins.

Au dispositif développé uniquement à la piscine Aspirant-Dunand s’ajoute une mesure appliquée cette fois à l’ensemble des bassins parisiens : une baisse d’un degré de la température de l’eau des grands bains, passée de 27° C à 26° C depuis la rentrée scolaire. « Avec cette baisse de température, nous souhaitons réduire l’impact environnemental et l’empreinte écologique, tout en diminuant la consommation de produits chimiques », explique l’adjoint aux sports. Cette baisse d’un degré pourrait se traduire par une réduction de 10 % de la facture énergétique liée au chauffage des piscines parisiennes.

« Nous sommes vraiment en train de passer à un nouveau modèle énergétique, complète Célia Blauel, adjointe chargée de l’environnement et du développement durable. L’avenir n’est plus aux gros systèmes mastodontes centralisés, mais aux solutions locales ».

Valoriser les 2 400 km du réseau d’assainissement

L’élue rappelle que ce type de dispositif innovant s’inscrit dans le cadre du Plan Climat-air-énergie de la ville, qui vise à réduire de 25 %, d’ici à 2020, les émissions de gaz à effet de serre et la consommation énergétique par rapport à 2004, et fixe à la même échéance un objectif de 25 % d’énergies renouvelables ou de récupération. L’idée portée par cette initiative est aussi de donner un nouvel usage aux 2 400 kilomètres du réseau d’assainissement de la capitale.

Dans le même esprit, la ville est en train de développer des systèmes de récupération de la chaleur produite par les data centers. D’ici début 2007, l’eau des bassins cette fois de la piscine de la Butte aux Cailles, dans le 13e arrondissement, sera chauffée grâce à l’énergie dégagée par les serveurs informatiques d’un data center en cours d’installation dans le quartier.

D’ici la fin de la mandature, ce type d’aménagements en énergie renouvelable ou de récupération est appelé à se multiplier. Vingt-cinq sites au sein de la capitale sont d’ores et déjà engagés dans un projet. L’hôtel de ville est lui-même depuis l’hiver 2015 chauffé par les eaux chaudes du réseau de chauffage urbain, de celui des eaux usées et des circuits de refroidissement.