Où s’arrêtent les câbles, où commence le sans-fil ? En matière de surveillance, la frontière est floue. La loi sur le renseignement, adoptée en 2015 et qui étend ou régularise les pouvoirs des services de renseignement, a préservé une disposition concernant la « surveillance hertzienne » – l’écoute des réseaux sans fils.

Un article, vieux de vingt-cinq ans et particulièrement large, permet aux services de renseignement de s’affranchir de tous les contrôles sur les écoutes, selon plusieurs associations de défense des internautes, dont La Quadrature du Net et la fédération FDN, qui ont attaqué cet article par une question prioritaire de constitutionnalité (QPC).

Ce 11 octobre, devant le Conseil constitutionnel, l’avocat des associations, Me Spinozi, estimait que ce dossier passablement technique était en réalité « très simple » sur le plan juridique. C’est l’argument principal des adversaires du texte : très large, il ne définit pas précisément ce qu’est une communication hertzienne – de nombreux échanges empruntent en partie la voie des ondes pour être acheminées, vers les téléphones portables notamment.

« Le gouvernement cherche à minimiser à outrance la portée du texte, estime Me Spinozi. La transmission hertzienne concerne en réalité presque toutes les transmissions. Selon le secrétaire général du gouvernement, il faudrait distinguer entre les transmissions partiellement et essentiellement hertziennes, qui elles seules seraient concernées, et ne concerneraient plus que 1 % des échanges mondiaux. »

Et en effet, pour le gouvernement, il existe une pratique bien ancrée, qui fait que seuls les échanges totalement hertziens seraient concernés par ces mesures, visant principalement à vérifier que les canaux radio utilisés notamment par les services de secours ne soient pas piratés. « Les communications par portable et le Wi-Fi relèvent du régime général », et sont donc soumises au régime d’autorisation et de contrôle, a assuré le secrétariat général du gouvernement à l’audience.

Problème, pour les associations qui les contestent : rien de tout cela n’est précisé dans la loi, laissant une « scorie volontaire dans notre droit », selon Me Spinozi. Elles demandent donc la censure de l’article – à charge pour le législateur de réécrire un nouveau texte. En cas de censure, le gouvernement a demandé au Conseil constitutionnel de prévoir un délai pour qu’un nouveau texte puisse être adopté.