Documentaire sur Arte à 20 h 55

OGM - Mensonges et vérites - bande-annonce - ARTE
Durée : 00:28

Dans la façon dont les humains se nourrissent depuis leur apparition sur cette terre, il y a un avant et un après la décennie 1990 : il y a l’ère pré-OGM puis la révolution de l’agriculture actuellement en cours. Apparues il y a deux décennies à peine, les plantes génétiquement modifiées occupent déjà 11 % des surfaces cultivées autour du globe.

De cette conquête des continents à marche forcée, rythmée par les découvertes et les controverses, Frédéric Castaignède a su tirer une saga pleine de rebondissements, de brevets juteux et de paysans démunis, de réelles aspirations au progrès et de colères de faucheurs de champs. Son remarquable documentaire – pondéré, pertinent et pédagogue –, prend le temps de revenir aux débuts des OGM. Un rappel essentiel pour comprendre l’enthousiasme et les espoirs de rendements et de jours meilleurs qu’elle a suscités.

Rêves de lendemains prospères

Modifier une plante en introduisant dans son patrimoine un gène supplémentaire issu d’une bactérie, afin de la rendre résistante aux attaques d’insectes ravageurs comme la pyrale et la chrysomèle, les agriculteurs américains en avaient sans doute rêvé jusqu’à ce que les chercheurs de l’agrochimie réalisent leur souhait. Mieux encore : ces derniers ont aussi mis au point des cultures capables de tolérer d’être aspergées d’un herbicide tandis que toute autre « mauvaise herbe » autour était exterminée. Plus simples, plus sûrs, les OGM séduisent immédiatement : aujourd’hui sur le sol américain : 90 % des récoltes de soja, du coton et du maïs sont transgéniques.

Seulement, les exploitants se sont trouvés fort dépourvus quand les contrariétés sont venues, les rêves de lendemains prospères se sont dissipés. « Pour amortir le coût plus élevé des semis, je me suis agrandi et les autres aussi », témoigne un agriculteur en casquette, un peu perdu au milieu de son immense terrain. A des kilomètres à la ronde, pas un arbre n’a subsisté ; ni un voisin d’ailleurs. Puis le prix des graines a augmenté, tandis que le fournisseur Monsanto interdisait formellement de replanter les récoltes de la saison précédente. Et comme le montre ce film, la firme n’hésite jamais à attaquer, allant même jusqu’à faire condamner un exploitant canadien qui avait semé du colza transgénique accidentellement apporté par le vent sur ces terres.

Ruée sur le colza transgénique en Argentine

Monsanto poursuit, nie, dénigre à tout va. Qu’il s’agisse des scientifiques du Centre international de recherche sur le cancer, des opposants à son modèle monopolistique au Ghana, des consommateurs américains qui réclament un étiquetage sur les aliments OGM, ou des riverains tombés malades en Argentine.

Là-bas, il y a vingt ans, des améliorations de rendements de 7 % à 10 % ont déclenché une ruée sur le colza transgénique. Les surfaces ont augmenté de 50 %, tandis que dans le même temps les volumes de pesticides faisaient un bond de 850 %.

Car contrairement aux promesses, les OGM n’ont pas supprimé les traitements. Au contraire : les insectes mais aussi les plantes intruses se sont adaptés aux monocultures et sont devenus résistants. Les exploitants ont alors eu de plus en plus recours aux produits phytosanitaires. Cancers, fausses couches : les quatorze millions d’Argentins vivant non loin des zones d’épandage par avion en paient le prix fort.

Le mot de la fin revient au biologiste et généticien Pierre-Henri Gouyon. « Avant vous ne pouviez pas consommer une plante qui avait reçu du RoundUp puisqu’elle était forcément morte, expose-t-il posément. Maintenant, avec le gène qui lui permet d’y survivre, nous pouvons manger de l’herbicide dont on sait finalement assez peu de chose… » La question de la santé humaine risque de s’imposer dans les prochains épisodes de la saga des OGM.

OGM, mensonges et vérités, de Frédéric Castalgnède (Fr., 2016, 100 min).