Les Sénateurs français lors d’une minute de silence, observée le 7 avril 2015. | © Charles Platiau / Reuters / REUTERS

Le projet de loi égalité et citoyenneté devait marquer à gauche, il a été adopté par le Sénat, de droite, mardi 18 octobre, après que celui-ci l’eut profondément réécrit. Dernier texte d’envergure du quinquennat, ce projet de loi contient une série de mesures pour la jeunesse, la mixité sociale ou contre les discriminations.

Cent soixante-dix-sept sénateurs, surtout de droite, se sont prononcés en faveur de la nouvelle mouture de ce texte, qui se veut une réponse à ce que Manuel Valls avait dénoncé, après les attentats de janvier 2015, comme un « apartheid territorial, social et ethnique » en France et dans ses banlieues. En revanche cent quarante-six, essentiellement de gauche, ont voté contre.

Le texte doit faire à présent l’objet d’une commission mixte paritaire chargée de trouver un accord entre les deux chambres. En cas d’échec, probable, l’Assemblée nationale, où la gauche est majoritaire, aura le dernier mot.

Un texte « complètement dénaturé ! »

« Cent quarante et un articles ont été votés conformes, et je m’en réjouis. Pour le reste, nous verrons au retour à l’Assemblée nationale », a déclaré à l’issue du scrutin le ministre de la ville, Patrick Kanner.

« La majorité sénatoriale n’a pas seulement réécrit ou modifié le texte, elle l’a complètement dénaturé ! », s’est exclamé Jacques-Bernard Magner (PS), qui a aussi accusé la droite en commission « d’avoir utilisé des artifices de procédure » pour empêcher que des amendements soient discutés en séance.

Avec certains de ces amendements, le gouvernement « voulait mettre en place la première étape de la réforme des minima sociaux », a dit M. Magner, selon qui « pour des raisons strictement politiciennes, la majorité sénatoriale a choisi de pénaliser les Français les plus modestes ».

IVG, minijobs, HLM : un « cabinet de curiosités »

De la même manière, un amendement du gouvernement destiné à élargir le délit d’entrave à l’IVG aux sites Internet qui véhiculent des informations biaisées sur l’avortement a été rejeté, a relevé l’élu du Puy-de-Dôme. Seule proposition « innovante » de la droite sénatoriale, a-t-il critiqué, « la création de minijobs à l’allemande pour les 18-25 ans, des sous-contrats précaires semblables au CPE refusé massivement par les Français il y a plus de dix ans ».

Pour la rapporteuse du texte, Françoise Gatel (UDI-UC), cette loi doit en priorité lutter « sans merci contre le chômage et les inégalités scolaires ». Seul moyen, selon elle, pour « permettre de faire face aux injustices sociales et territoriales ».

Mme Gatel a estimé qu’à l’exception de quelques mesures, le gouvernement « a réalisé un inventaire de bonnes intentions si hétéroclites qu’il a abouti à un véritable cabinet de curiosités ».

Les symboles enterrés, abrogés ou tus

Pour Christian Favier (Communiste, républicain et citoyen), « l’un des symboles du pacte républicain a été enterré ici au Sénat, la loi SRU », qui impose aux communes au moins 25 % de logements sociaux. Les sénateurs ont en effet instauré un « contrat d’objectifs et de moyens » entre les collectivités et le préfet pour définir le taux de logements sociaux dans les communes.

Plusieurs amendements renforçant les sanctions applicables aux délits de presse, dans l’objectif de s’attaquer aux injures et aux diffamations sur Internet, avaient fait polémique. Mais les intervenants n’ont pas fait mention de ces dispositions, qui devraient être rejetées par les députés. Par ailleurs, le Sénat a abrogé le délit de blasphème, qui existait encore dans le droit local en Alsace-Moselle.