Un site d’extraction de gaz naturel liquifié de Saudi Aramco sur le gisement de Shaybah, en Arabie Saoudite, près de la frontière avec les Emirats arabes unis, en mai. | IAN TIMBERLAKE / AFP

Si l’opération Saudi Aramco se fait, ce sera la plus grosse introduction en Bourse de l’histoire. Et une révolution politique pour le royaume wahhabite, qui gardait la haute main sur l’une des sociétés les plus riches, secrètes et tentaculaires de la planète. La chute des prix du brut, de 114 dollars, en juin 2014, à 50 dollars, aujourd’hui, et la grande opacité de la société ont freiné le lancement du processus, mais Riyad est bien décidé à prendre ce virage historique depuis la nationalisation de l’Aramco, en 1980.

« Nous sommes optimistes. Les marchés pétroliers ont commencé à se redresser et nous nous attendons à ce qu’ils se redressent davantage en 2017, a déclaré Amin Nasser, le PDG de l’entreprise, au congrès mondial de l’énergie, à Istanbul, mardi 11 octobre. Je pense que 2018 sera le bon moment. » Cette ouverture d’environ 5 % du capital est l’une des mesures phares du plan « Vision 2030 » présenté en avril par le vice-prince héritier, Mohammed Ben Salmane, pour moderniser et diversifier l’économie saoudienne.

Quatre à six fois la valeur d’Apple

Les dirigeants de la compagnie sont prêts à vendre des parts dans les étapes de raffinage et de distribution mais aussi dans le cœur de métier, la production de pétrole, a révélé M. Nasser dans un entretien à l’agence Bloomberg. Même si l’on ignore la valorisation précise de l’entreprise, estimée entre 2 000 et 3 000 milliards de dollars par Riyad (soit quatre à six fois celle d’Apple), ses dirigeants attendent de cette mise en Bourse plus de 100 milliards de dollars – quatre fois les fonds levés par le géant chinois du commerce en ligne Alibaba, en 2014. Saudi Aramco sera coté à Riyad et probablement à New York, Londres ou Hongkong, a indiqué le PDG.

« Nous devons faire un gros travail en interne pour nous préparer à cette cotation, a reconnu M. Nasser. Nous introduisons en Bourse une part de la compagnie entière, pas seulement le downstream” [raffineries, stations-service…] », et « il n’y a pas d’obstacles », les acheteurs potentiels devant « évaluer la taille d’Aramco et sa complexité ». C’est peu dire que le groupe est complexe puisqu’il gère jusqu’à des écoles, des fermes et des hôpitaux. Et est une véritable boîte noire. Les investisseurs seront prudents. Les réserves de brut et de gaz n’appartiennent pas à la Saudi Aramco et n’ont jamais fait l’objet d’un audit, contrairement à celles des majors occidentales, qui répondent aux critères de la Security and Exchange Commission, l’autorité des marchés financiers américaine. Cela fait vingt ans que Riyad affirme posséder 260 milliards de barils – l’équivalent de soixante-dix ans de production au rythme actuel –… sans avoir fait de découvertes majeures entre-temps.