Le siège du comité olympique russe, le 25 juillet. | KIRILL KUDRYAVTSEV / AFP

Son incarcération n’aura pas duré deux semaines. Habib Cissé, l’ex-conseiller de l’ancien patron de la fédération internationale d’athlétisme (IAAF), Lamine Diack, a été remis en liberté, lundi 24 octobre. Il avait été placé en détention provisoire douze jours plus tôt, dans le cadre de l’enquête menée par la justice française sur des soupçons de corruption à la tête de la fédération.

Habib Cissé est mis en examen depuis novembre 2015 pour « corruption passive », tout comme l’ancien patron de l’antidopage, le Français Gabriel Dollé. Lamine Diack, à la tête de l’IAAF de 1999 à 2015, est quant à lui poursuivi pour « corruption » et « blanchiment aggravé ». La justice soupçonne les trois hommes d’avoir caché des cas de dopage dans l’athlétisme russe, en échange d’argent. Mais, jusqu’alors, aucun n’avait jusqu’alors été incarcéré.

Dans sa décision du 24 octobre, la chambre de l’instruction de la Cour d’appel de Paris a infirmé le placement en détention provisoire de M. Cissé, ordonné par un juge des libertés et de la détention à la demande des magistrats chargés de l’enquête sur l’IAAF. Elle estime suffisant le contrôle judiciaire auquel il est soumis. La semaine dernière, les avocats d’Habib Cissé, Mes Louis-Marie de Roux et Cédric Labrousse, avaient dénoncé l’incarcération de leur client, l’estimant « invraisemblable et injustifiée ».

« Pas l’impression d’une grande sérénité »

Contacté par Le Monde, Me de Roux se félicite de cette nouvelle étape, « logique ». « Cela permet de s’étonner fortement de la décision du juge [Renaud Van Ruymbeke], au bout d’un an d’instruction, de déférer M. Cissé devant le juge des libertés et de la détention, ce qui est rarissime et invraisemblable compte tenu du dossier. La chambre d’instruction a considéré qu’il n’y avait pas de circonstances nouvelles qui justifiaient un placement en détention. Par ailleurs, je vous fais observer que l’Agence mondiale antidopage (AMA), qui est la partie plaignante dans cette affaire, a été condamnée la semaine dernière. »

Il y a moins d’une semaine – mercredi 19 octobre –, l’ancien conseiller juridique personnel de Lamine Diack a fait condamner l’AMA pour atteinte à la présomption d’innocence devant le Tribunal de grande instance (TGI) de Paris. En janvier, l’AMA avait présenté le rapport accablant d’une commission indépendante, dans lequel Habib Cissé était notamment présenté comme ayant « participé à la conspiration visant à extorquer des fonds à des athlètes en dissimulant, retardant ou éliminant les sanctions disciplinaires prononcées contre les athlètes russes ». Les magistrats de la 17e chambre civile du TGI ont jugé que les formulations du rapport traduisaient « à l’évidence un préjugé de culpabilité, sans nuance ni précaution » et omettaient le fait qu’il est « présumé innocent ».

L’AMA et Richard Pound, à la tête de la commission qui a rédigé le rapport, ont été condamnés solidairement à verser 8 000 euros de dommages et intérêts à M. Cissé et 2 500 euros de frais de justice. Me de Roux dresse un parallèle entre les deux récents épisodes judiciaires : « Dans les deux cas, c’est la question de la sérénité des organes de poursuite [AMA et juges d’instruction français] qui se pose. Et dans cette affaire, nous n’avons pas toujours l’impression d’une très grande sérénité. »