Le ministère de l’intérieur a annoncé, mercredi 2 novembre, la fermeture groupée de quatre mosquées en région parisienne, toutes soupçonnées de diffuser des discours appelant à la haine, à la violence, ou faisant l’apologie du terrorisme. Des décisions qui s’inscrivent dans le cadre de l’Etat d’urgence. Depuis, les attentats de Paris en novembre 2015, une vingtaine d’autres lieux de culte ont été fermés. Le 28 octobre, la place Beauvau a également lancé une procédure de dissolution contre Sanabîl, une association d’aide aux détenus musulmans et à leurs familles, pour ses liens présumés avec l’islamisme radical.

Les quatre mosquées – situées dans les départements des Yvelines, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne –, étaient dans le collimateur du ministère de l’intérieur depuis des mois et surveillées de près par le renseignement territorial. Leur fermeture prend effet immédiatement. Néanmoins, la dissolution formelle des associations gérantes de ces lieux de culte n’est pas garantie et pourrait prendre du temps. Elle nécessite en effet un décret en conseil des ministres qui peut faire l’objet d’un recours devant le Conseil d’Etat.

Jusqu’à présent, seulement trois associations cultuelles liées à une mosquée de Lagny-sur-Marne (Seine-et-Marne), ont été formellement dissoutes depuis l’instauration de l’Etat d’urgence. Dans le cas de Lagny-sur-Marne, la mosquée avait été fermée dès le mois de décembre 2015, suite notamment à la découverte de munitions de kalachnikov et de vidéos de propagande de l’organisation Etat islamique (EI). Mais l’association gestionnaire n’a été concrètement dissoute que sept mois plus tard, en juillet dernier.

Le ministère de l’intérieur estime avoir pris le temps, dans le cas des quatre mosquées visées aujourd’hui, de constituer des dossiers solides. Ces quatre lieux de culte seraient des lieux de « référence pour la mouvance salafiste ». Des endroits présentants par leur « fonctionnement » et leur « fréquentation » une « menace grave pour la sécurité et l’ordre public » selon les différents arrêtés préfectoraux pris les concernant. Mais des faits relativement précis leur sont également reprochés individuellement.

Influence indéniable

En Seine-et-Marne, la mosquée « El Islah » de Villiers-sur-Marne a ainsi longtemps été le lieu de prêches ouvertement radicaux. Selon nos informations, le père d’Hayat Boumeddiene, la compagne du tueur de l’Hyper Cacher Amédy Coulibaly, a un temps été membre du comité directeur. Les prêches étaient devenus plus lisses récemment suite au démantèlement de filières de recrutement au départ de l’agglomération (à Champigny-sur-Marne notamment). Mais la mosquée restait fréquentée par de nombreux fidèles liés à des individus partis en Syrie. Un certain nombre faisait l’objet de procédures judiciaires ou de condamnations pour des faits d’association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste. Selon le ministère, la mosquée El Islah exerçait une influence indéniable sur leur radicalisation. Le 31 août, une école coranique non déclarée qui prodiguait un enseignement radical avait été découverte par les services d’enquête. Parmi l’équipe pédagogique, se trouvait un individu impliqué dans une des associations dissoutes de Lagny-sur-Marne qui faisait par ailleurs l’objet d’une interdiction de sortie du territoire.

Dans les Yvelines, la mosquée visée est celle dite d’Ecquevilly. Il lui est notamment reproché les prêches radicaux de son imam, dont les conférences sur Internet sont très suivies, en particulier sur un site appelé La Voie Droite, vecteur important de diffusion de l’islam radical en français. Il aurait notamment légitimé, fin novembre 2015, les attentats de Paris. Si depuis, son discours se serait aussi assagi, il lui est reproché de continuer à rejeter l’autorité de l’Etat, légitimer la mise en place d’un gouvernement musulman et appeler à la discrimination et à la haine contre juifs et chrétiens. A l’image des nombreux ouvrages de la bibliothèque de la mosquée que seraient encouragés à lire les fidèles. Une littérature où est notamment cautionnée la violence physique sur les femmes désobéissantes, ainsi que la mise à mort des apostats et des personnes ayant eu des relations sexuelles hors mariage.

Là encore, une école coranique non déclarée a été découverte au sein de la mosquée. Plusieurs incidents ont été rapportés par les enseignants des écoles primaires d’Ecquevilly. Des enfants suivant les cours de cette mosquée qui avaient refusé des activités comme la musique, le chant ou les jeux et s’en étaient pris à leurs camarades plus modérés.

En Seine-Saint-Denis, deux mosquées sont aujourd’hui visées : une à Clichy-sous-Bois, une autre à Stains. Leur profil est similaire à celles de d’Ecquevilly et de Villiers-sur-Marne, l’école coranique en moins. A Clichy-sous-Bois, une perquisition menée en septembre dans la partie privative du pavillon qui accueille la mosquée et dont est propriétaire le gestionnaire du lieu de culte, a permis aussi la découverte d’une arme vieille de trente ans, usagée mais fonctionnelle, et d’une grenade à plâtre, selon la préfecture. Enfin, celle de Stains était le lieu de prière des frères Clain, les voix de la revendication des attentats du 13 novembre.