Congrès de la CSU à Munich, le 5 novembre 2016. | MICHAELA REHLE / REUTERS

Julian Bestler a 22 ans. Cela fait seulement six mois que cet étudiant en électrotechnique a adhéré à l’Union chrétienne-sociale (CSU). Vendredi 4 novembre, il a enfilé son plus beau costume pour assister à son premier congrès en tant que militant du parti conservateur bavarois. Il ne souhaitait pas manquer un mot des discours qui, dans l’une des immenses salles du parc des expositions de Munich, résument la raison d’être de la CSU (« Défendre l’ordre dans un monde en désordre »), et appellent à tout faire pour empêcher la gauche de remporter les élections législatives de septembre 2017. Une victoire qui, selon Horst Seehofer, l’homme qui cumule depuis 2008 les fonctions de ministre-président du Land de Bavière et de président de la CSU, « entraînerait des hausses d’impôts », créerait de « nouvelles dettes » et marquerait l’avènement d’une « société multiculturelle ».

Avec tout cela, Julian Bestler est d’accord. Pour autant, il n’a « pas très envie d’aller voter l’année prochaine ». En cause : la politique d’Angela Merkel à l’égard des réfugiés. Une politique que la CSU n’a certes eu de cesse de dénoncer au cours des derniers mois. Mais qu’en sera-t-il quand la chancelière se déclarera candidate à un quatrième mandat – ce qu’elle pourrait annoncer lors du congrès de son parti, l’Union chrétienne-démocrate (CDU), qui aura lieu du 5 au 7 décembre à Essen (Rhénanie-du-Nord-Westphalie) ? La nécessité de trouver un compromis avec la CDU ne contraindra-t-elle pas son alliée bavaroise à adoucir son discours et à renoncer à certaines de ses revendications, comme l’établissement d’un « plafond », fixé à 200 000, du nombre de demandeurs d’asile pouvant être accueillis chaque année en Allemagne ?

Presque par résignation

Si tel est le cas, Julian admet qu’il sera bien « embarrassé » le jour des élections. « Si la CSU me déçoit, je voterai peut-être pour un autre parti », reconnaît le jeune militant. Lequel ? « Pour l’instant, aucune idée », concède-t-il. Alternative pour l’Allemagne (AfD), ce parti anti-Europe, anti-immigration et anti-islam qui, trois ans seulement après sa création, est déjà présent dans dix des seize Parlements régionaux du pays et que les derniers sondages créditent d’environ 12 % des voix aux prochaines législatives ? « Je connais pas mal de gens qui vont probablement voter AfD, mais moi, non, il n’en est pas question, je ne suis pas d’extrême droite, je suis un démocrate », explique-t-il, avant de convenir qu’il « finira peut-être par voter pour la reconduction de Merkel » parce qu’il ne voit « pas vraiment qui d’autre à sa place ».

Merkel faute de mieux, Merkel malgré tout, Merkel tout compte fait… Si la direction de la CSU a pour la première fois choisi de ne pas convier Mme Merkel à son congrès, afin d’éviter que celle-ci ne soit chahutée, comme ce fut le cas en 2015, son choix est fait : en 2017, elle fera à nouveau campagne à ses côtés. Par raison, presque par résignation, parce qu’« il est bon pour l’Allemagne que la CDU et la CSU soient au pouvoir », et que rien ne serait pire qu’un gouvernement « rouge-rouge-vert », dirigé par le Parti social-démocrate (SPD), Die Linke (gauche radicale) et les Verts, comme l’a expliqué Horst Seehofer.

« Contenir l’AfD »

A l’évidence, le message a été entendu. Pour preuve : l’échec d’une motion demandant que la CSU s’engage à ne pas soutenir Mme Merkel en 2017. Parmi les 1 000 délégués venus assister au congrès du parti, vendredi et samedi, celle-ci n’a recueilli que 16 voix. Comment expliquer un si faible score ? Pour Wolfgang Franz, militant CSU depuis 1980, les dernières déclarations de la chancelière y sont pour beaucoup : « Après les défaites de la CDU [aux élections régionales de septembre] en Mecklembourg-Poméranie-Occidentale et à Berlin, elle a changé. Elle a reconnu qu’elle avait fait des erreurs dans sa politique vis-à-vis des réfugiés. Aujourd’hui, sur le fond, ses positions ne sont plus très éloignées des nôtres », explique-t-il. « Pour nous, le vrai défi est là : comment contenir la poussée de l’AfD ? C’est pour cela qu’il faut que la CSU s’affirme vraiment comme un parti conservateur », précise M. Franz.

En Bavière, où les élections régionales auront lieu à l’automne 2018, les derniers sondages créditent le parti d’extrême droite de 9 % et la CSU de 44 % des voix. Pour celle-ci, qui n’a été privée de sa majorité absolue au Parlement de Munich qu’une seule fois en cinquante ans, ce serait un camouflet.