« Le Client » d’Asghar Farhadi avec Taraneh Alidoosti et Shahab Hosseini. | HABIB MAJIDI/MEMENTO FILMS DISTRIBUTION

Mercredi 9 novembre, sort en France Le Client, du réalisateur iranien Asghar Farhadi. Dans son pays, les films du cinéaste de 44 ans, lauréat de l’Ours d’or au Festival de Berlin pour Une séparation en 2011, ne passent jamais inaperçus, tant la colère des plus conservateurs à son égard est vive. En salles depuis le 31 août en Iran, Le Client n’a pas dérogé à cette règle et continue encore aujourd’hui à provoquer critiques et indignations.

En mai, dès que le film a été sélectionné au Festival de Cannes (où il a remporté les Prix d’interprétation masculine et du scénario), les médias conservateurs ont accusé Farhadi d’avoir eu recours aux « cheikhs arabes » pour son financement. En cause, la participation d’un fonds du Festival de Doha. « La présence d’un partenaire arabe humilie le cinéma iranien sur la scène internationale », s’était étranglé le porte-parole du ministère de la culture et de l’orientation islamique, Hossein Noushabadi. La chose est impardonnable en Iran, où existe un climat de méfiance envers les États du Golfe : jugés peu cultivés, ils sont aussi considérés aux ordres de Riyad. Or, l’Arabie saoudite et l’Iran n’ont plus de relation diplomatique depuis l’attaque contre l’ambassade saoudienne à Téhéran, en janvier.

En lice pour les Oscars 2017

Quelques mois plus tard, ces critiques ont pris une autre tournure, ciblant cette fois l’actrice principale, Taraneh Alidoosti. Lors de la présentation du film à Téhéran, alors que la comédienne de 32 ans essayait d’ajuster le micro d’Asghar Farhadi, son tatouage sur l’avant-bras, un poing à l’intérieur du symbole de la femme, a attiré les objectifs de photographes : dès lors Taraneh Alidoosti fut taxée par des sites conservateurs de soutenir le « féminisme ». Un mouvement qui, selon ces derniers, « prône l’avortement », acte illégal en Iran. L’histoire du film — l’agression de l’héroïne et le combat de son mari pour trouver le coupable — n’a pas été non plus épargnée.

Selon ses détracteurs, Farhadi a orchestré tous les détails pour que l’agresseur paraisse pardonnable et que les comportements du protagoniste joué par Shahab Hosseini, essayant de défendre son honneur et de le restaurer, déplaisent. « Le Client est le film le plus vicieux de Farhadi », peut-on lire sur le site conservateur Raja News qui explique en long et en large que cette œuvre « remet en question la colère sainte » de l’homme et qu’elle essaye de donner raison au client de la prostituée dans le film.

Lire la critique du film : La froide mécanique de la vengeance

Malgré ces attaques, Le Client a connu un grand succès en Iran. Fait inédit : les premières semaines de sa projection, les salles iraniennes ont ajouté des séances, dès 6 heures du matin. Et un marché noir a également vu le jour quand les salles étaient complètes, les places se vendant parfois cinq fois plus chères que le prix habituel (2,50 €). Pour le seul premier jour de projection, le film a battu le record du nombre d’entrées dans l’histoire du cinéma iranien, avec l’équivalent de 65 200 euros. Le Client a été choisi pour représenter la République islamique d’Iran aux Oscars 2017.

« Le Client », d’Asghar Farhadi, avec Taraneh Alidoosti, Shahab Hosseini, Babak Karimi. 2 h 03. En salles le 9 novembre.

Bande-annonce

LE CLIENT Bande Annonce (Asghar Farhadi, 2016)
Durée : 02:10