Siemens fête son retour en grâce. Le groupe de Munich, qui a présenté, jeudi 10 novembre, ses résultats pour l’année comptable 2015-2016, voit un net rebond de son chiffre d’affaires et de sa marge opérationnelle. Après des années de mauvaises nouvelles, de résultats en berne et de perte de parts de marché, Siemens semble avoir réussi le tournant annoncé par son patron, Joe Kaeser.

Le conglomérat industriel spécialisé entre autres dans les technologies de production d’énergie, de transport et de matériel médical affiche un chiffre d’affaires en hausse de 5 %, à 79,8 milliards d’euros. Le résultat des activités industrielles est en hausse de 13 %, avec une marge en nette progression, à 10,8 %, contre 10,1 % en 2015. Mais, surtout, le carnet de commandes annonce des lendemains qui chantent : les commandes entrantes sont en hausse de 5 %, à 86,5 milliards d’euros. « L’année écoulée a été l’une des plus fortes de cette maison, en excluant la vente de participations, on peut même parler de la meilleure année de notre histoire », a déclaré M. Kaeser jeudi matin. Le groupe a aussi annoncé une mise en Bourse de son département de matériel médical, un secteur très profitable, afin de lui donner « plus de flexibilité ».

Changement de tendance

Les observateurs s’attendaient à de tels résultats. Par deux fois cette année, le groupe de Munich avait revu ses prévisions à la hausse. Et, lors des conférences d’analystes, le PDG répétait à l’envi que son groupe était en « excellente forme » et qu’il avait trouvé « la formule gagnante » pour remettre Siemens sur les rails. La nouvelle communication du groupe, dévoilée en décembre 2015, était à l’image de cette confiance retrouvée : M. Kaeser, sans cravate ce jour-là, présentait le fondateur de l’entreprise, Werner von Siemens, né il y a deux cents ans, comme un Steve Jobs du XIXsiècle.

Jusque récemment, il était difficile de ne pas y voir qu’une opération marketing. Trop nombreuses furent les années marquées par des pannes monumentales sur les chantiers éoliens en mer du Nord, sans compter les retards coûteux dans la livraison des trains rapides ICE à Deutsche Bahn, l’étonnant vide en matière de développement des innovations et les luttes intestines qui ont mené à l’éviction de l’ancien PDG Peter Löscher en 2013.

Certaines unités fonctionnent à plein régime ou fêtent leur grand retour.

Mais les résultats enregistrés montrent un réel changement de tendance et rassurent en interne – le groupe, en effet, n’a pas été épargné par la presse depuis 2011. Certaines unités fonctionnent à plein régime ou fêtent leur grand retour. C’est le cas du département centrales électriques, restructuré à l’automne 2014 et qui a rattrapé son retard par rapport à GE. Le contrat historique signé en juin 2015 en Egypte, pour trois centrales à gaz et 12 parcs éoliens, a été un signe fort de reprise. Il devrait rapporter au groupe 8 milliards d’euros.

Le département technique ferroviaire, si ringardisé par les affaires de retard de livraison que la question de son maintien dans le groupe s’est sérieusement posée, assiste lui aussi à une reprise de ses commandes. Siemens a également pu consolider sa position dans l’éolien grâce au rachat de Gamesa en juin, qui lui a permis de devenir le numéro un mondial du secteur.

Pour M. Kaeser, ces succès se savourent, tant la patience des investisseurs à été mise à rude épreuve. Arrivé à la tête du directoire en 2013, après avoir été longtemps son directeur financier, ce fils d’ouvrier bavarois, pur produit du groupe, a opéré une grande restructuration et supprimé des milliers d’emplois. Un plan dont les résultats se sont longtemps fait attendre. Mais son engagement très fort pour décrocher de gros contrats, à l’image de celui signé avec l’Egypte, négocié personnellement avec le président Al-Sissi, a fini par payer. Selon la presse allemande, le patron veut désormais s’appuyer sur ces succès pour prolonger son contrat au-delà de 2018.