La centrale nucléaire EPR de Flamanville. | AFP/CHARLY TRIBALLEAU

Dans l’affaire de fraude au détachement de 460 salariés polonais et roumains sur le chantier du réacteur nucléaire EPR de Flamanville (Manche), le parquet de Caen (Calvados) a requis, mercredi 9 novembre, le doublement des amendes à l’encontre de quatre entreprises, dont Bouygues TP, auxquelles celles-ci avaient été condamnées en première instance à Cherbourg en 2015. Soit 50 000 euros pour Bouygues, par exemple, au lieu de 25 000. Une plus grande sévérité donc, même si ce montant reste trois fois inférieur à celui requis par le parquet de Cherbourg. La cour d’appel rendra sa décision le 20 mars.

Jeudi 10 novembre, sur le même thème, la Cour d’appel de Riom (Puy-de-Dôme) a elle aussi fait preuve d’un peu plus de hardiesse que le tribunal correctionnel de Clermont-Ferrand en 2015. Alberto Verissimo, le président de la société de second œuvre BTP Vériferme, établie à Menetrol (Puy-de-Dôme), aujourd’hui en redressement judiciaire, a été condamné pour prêt de main-d’œuvre illicite à 6 mois de prison avec sursis (contre 3 mois en première instance) et à une amende de 10 000 euros pour fausse sous-traitance. L’Urssaf, partie civile, qui avait chiffré son manque à gagner à cause de cette fraude à plus de 1 million d’euros, obtient 500 euros de dommages et intérêts. La CGT, partie civile également, recevra 1 000 euros.

Grâce à la société portugaise d’intérim Tempo Indeterminado, Vériferme avait, entre janvier 2012 et septembre 2014, fait travailler quinze ouvriers portugais sur le chantier des bureaux de La Banque postale. A l’issue de contrôles, l’inspection du travail dresse un procès-verbal d’infraction pour « travail dissimulé fondé sur de la fausse sous-traitance ».

Un salaire mensuel de 700 euros

Il s’avère, en effet, que M. Verissimo était cogérant de Tempo Indeterminado ; que celle-ci n’avait aucune activité sur le sol portugais sauf le recrutement de salariés pour les détacher immédiatement en France ; que les salariés portugais travaillaient uniquement sous les ordres des cadres de Vériferme. En fait, ils n’étaient pas légalement détachés, les contrôles n’ayant pas permis de trouver les tampons de l’organisme social portugais, ni même français. Ils n’avaient donc aucune couverture sociale et les salaires étaient de 700 euros par mois pour 40 heures de travail par semaine.

En octobre 2014, l’un de ces salariés, soutenu par la CGT, engage une action prud’homale qui lui a permis de faire requalifier son contrat d’intérim portugais en contrat à durée indéterminée français avec Vériferme et le faire condamner à plus de 12 000 euros (indemnités de congés payés, de panier, de préavis, de dommages et intérêts…). Le président de Vériferme a fait appel.

« Bien que clément, ce jugement, va quand même coûter cher à l’entreprise, met en avant René de Froment, membre de l’Union syndicale CGT de la construction du Puy-de-Dôme. Car l’Urssaf, qui poursuit Vériferme, a maintenant l’appui juridique pour réclamer les cotisations sociales impayées. » En revanche, dans le dossier de l’EPR, l’Urssaf, qui aurait un manque à gagner de 12 millions d’euros, n’est pas partie civile.