Le président François Hollande, le premier ministre, Manuel Valls, et la ministre du travail, Myriam El Khomri, à la fin de mai à l’Elysée. | PASCAL ROSSIGNOL / REUTERS

Tous les décrets concernant le volet temps de travail de la loi travail promulguée en août, qui actent la primauté de l’accord d’entreprise sur l’accord de branche, sont parus samedi 19 novembre au Journal officiel, pour une entrée en vigueur au 1er janvier 2017. La parution de ces décrets va permettre l’application de l’article 8 (ex-article 2), colonne vertébrale de la loi qui a été au cœur de la contestation, ainsi que de l’article 9, relatif aux congés spécifiques (familiaux, vie associative, etc.), selon le ministère du travail.

« [Cette publication] va permettre à des accords d’intervenir assez rapidement sur le fondement de ces nouvelles dispositions. Nous avons voulu aller vite afin que les acteurs de l’entreprise aient tous les outils pour commencer à négocier », a-t-il expliqué, précisant que les négociations pouvaient démarrer dès à présent en perspective de l’entrée en vigueur de la mesure au 1er janvier 2017.

Un autre décret est paru concernant la transmission des accords d’entreprise à la branche : tous les accords, une fois signés, devront obligatoirement être transmis aux « commissions paritaires permanentes de négociation et d’interprétation » qui auront un rôle de « veille » sur les accords signés dans leur secteur, afin d’éviter notamment une distorsion de concurrence, a détaillé le ministère.

« Inversion de la hiérarchie des normes »

L’article 8, qui fait l’objet de deux décrets (un décret en Conseil d’Etat, un décret simple), réécrit toute la partie concernant le temps de travail dans le code du travail, organisé sur trois étages : l’ordre public ; le champ de la négociation collective ; et les dispositions supplétives applicables en l’absence d’accord d’entreprise ou de branche.

Philosophie de la loi, il vise à faire primer l’accord d’entreprise, majoritaire, sur la convention de branche pour la plupart des dispositions concernant le temps de travail ; ce que les opposants au texte voient comme une « inversion de la hiérarchie des normes », facteur de « dumping social ».

Il sera notamment possible de passer, par accord d’entreprise, à une moyenne hebdomadaire de travail de 46 heures (au lieu de 44) sur 12 semaines. Pour la majoration des heures supplémentaires, il sera également possible de descendre à 10 % par accord d’entreprise, et les branches qui pratiquent généralement 25 % perdent leur pouvoir de « verrou ».

Augmentation des congés spécifiques

Concernant les congés spécifiques, celui d’un salarié en cas de décès d’un enfant passe de deux à cinq jours, et celui pour la mort des parents et des beaux-parents, d’un frère ou d’une sœur, d’un à deux jours. Un autre décret relatif au congé de « proche aidant » a été publié.

La loi travail a été promulguée le 8 août, après cinq mois d’un âpre conflit social et politique. Le gouvernement a dû dégainer à trois reprises l’article 49.3 de la Constitution pour faire adopter le texte sans vote. Au terme d’une longue bataille dans la rue, les syndicats opposés au texte ont promis une bagarre juridique pour entraver sa mise en œuvre.

Son application nécessite au total plus de 120 décrets. Outre le temps de travail, la loi comprend de nombreuses autres mesures, comme la réforme, également controversée, des licenciements économiques, qui doit entrer en vigueur au 1er décembre sans décret, le référendum d’entreprise ou le compte personnel d’activité (CPA).