Bernard Laporte, le 14 avril à Bègles. | MEHDI FEDOUACH / AFP

A quand le débat télévisé à la mi-temps d’un match du XV de France ? On imagine déjà très bien les candidats, chacun derrière un pupitre, égrener leurs arguments. Côte à côte : Pierre Camou (dans le costume du président en exercice), Bernard Laporte (dans celui de l’opposant), Alain Doucet (dans celui du troisième larron). Le 3 décembre, au terme d’une campagne où les trois prétendants ressemblent parfois davantage à des hommes politiques qu’à des dirigeants de fédérations sportives, les 1 885 clubs du pays éliront le président de la Fédération française de rugby (FFR) pour les quatre prochaines années.

Pauvre Pierre Camou ! Pour ses deux premiers mandats, le banquier basque à la retraite avait été élu dans le confort absolu : aucune concurrence en 2008 ni en 2012. Le voilà aujourd’hui malmené comme jamais – et encore, un quatrième homme, le journaliste Pierre Salviac, a interrompu en cours de route la farce de sa candidature. Mais surtout, voilà M. Camou contraint de se plier à de nouveaux usages : lancement officiel de campagne au siège fédéral de Marcourssis (Essonne), il y a deux mois, puis déplacements à travers toute la France de l’Ovalie.

Cette façon de faire, Bernard Laporte a été le premier à l’imposer à tous. L’ancien entraîneur à succès de Toulon a commencé officiellement son agit-prop il y a un an déjà. Depuis septembre 2015, à chaque mois son lot de déplacements dans l’« Ovalie d’en bas », celle des clubs amateurs. Dernières visites en date : l’une en Dordogne, l’autre dans le Limousin, l’autre en Seine-Saint-Denis, le tout en l’espace d’une semaine. Un agenda de ministre.

Tribune médiatique

Ministre, M. Laporte l’a déjà été. Ou plus exactement, secrétaire d’Etat chargé des sports, de 2007 à 2009. L’entraîneur à casquette sortait d’une Coupe du monde décevante à domicile terminée au pied du podium, le quinquennat du président Nicolas Sarkozy débutait et François Fillon composait son deuxième gouvernement. Lointaine époque, en sport comme en politique.

Car aujourd’hui, au regard du Mondial 2015 et de la déroute en quarts de finale face aux Néo-Zélandais, la situation du rugby français s’est dégradée comme jamais. Du moins à entendre les deux opposants au taciturne Pierre Camou, 71 ans et déjà huit ans d’exercice du pouvoir à la « fédé ». Bernard Laporte le répète à longueur d’émissions grâce à la tribune que lui offre RMC. Alain Doucet aussi, mais il est moins audible. A court de relais médiatiques, l’actuel secrétaire général de la FFR a officialisé sa candidature en septembre 2016 seulement : « Je suis le petit Doucet du truc, le Petit Poucet face aux deux présumés gros », estimait-il lors de son annonce officielle à Pouyastruc, son village dans les Hautes-Pyrénées.

Le « petit Doucet » se prête lui aussi au jeu de l’élection. Comme ses deux concurrents, le dirigeant a lancé un site officiel de campagne qui affiche son programme, ses « valeurs », son « projet », ses soutiens. Et comme Bernard Laporte, le troisième homme a un thème central : annuler la construction d’un « grand stade » censé, selon les souhaits de Pierre Camou, accueillir à l’avenir en région parisienne tous les matchs du XV de France. Tournées d’automne comprises.