Le groupe de BTP a été victime d’un hoax mardi 22 novembre. | DOMINIQUE FAGET / AFP

Le cas est rare, mais il a coûté extrêmement cher à Vinci, le spécialiste français des bâtiments et travaux publics. Mardi 22 novembre, le cours de Bourse de ce pilier du CAC 40 a dévissé de près de 19 % à partir de 16 h 05. En quelques minutes, la valeur de l’action est passée de 61,81 euros à 49,93 euros, avant la suspension de sa cotation. La raison de cette dégringolade : la publication d’informations alarmantes sur les comptes du groupe.

Selon un communiqué envoyé à quelques rédactions et aux principales agences d’information, l’entreprise annonçait le licenciement de son directeur financier, Christian Labeyrie, après avoir découvert d’importantes erreurs comptables, relatives à ses exercices 2015 et du premier semestre 2016, portant sur quelque 3,5 milliards d’euros.

En bas du communiqué, figure le contact de l’attaché de presse de Vinci. Sauf que son numéro est erroné. Le document était un faux, un hoax en anglais. Cependant, certaines agences sont tombées dans le panneau, malgré quelques indices étonnants. Outre le numéro de téléphone, l’adresse du site affiché était « Vinci.group » et non Vinci.com.

Un faux démenti

De même, l’envoi d’un tel communiqué est rarement programmé pendant la cotation. Enfin, la version anglaise du document s’emmêlait les pinceaux entre millions et milliards d’euros… Qu’importe, le mal était fait. La valorisation du groupe de BTP (36 milliards d’euros, mardi matin) a fondu de 7 milliards en quelques minutes. A 16 h 44, un démenti parvient aux agences. Mais il s’agit également d’un faux !

Le vrai démenti, lui, n’est arrivé qu’à 17 h 01 sur les messageries électroniques des journalistes qui suivent le groupe de BTP : « Vinci dément formellement l’ensemble des “informations” qui figurent dans ce faux communiqué et étudie toutes les actions judiciaires à donner à la suite de cette publication. » Mercredi 23 novembre, le cours était remonté à 60,04 euros à l’ouverture des marchés.

Plusieurs sociétés victimes de faux

Peu après, un communiqué signé de proches des activistes de Notre-Dame-des-Landes, là où Vinci doit construire le nouvel aéroport de l’agglomération nantaise, revendiquait la manipulation à des fins politiques. Mais la thèse d’un piratage à des fins spéculatives du cours de Bourse semble également crédible. Saisie du dossier, l’Autorité des marchés financiers (AMF) indique faire « son travail habituel de surveillance ». Elle se « réserve le droit d’étendre ses investigations, en fonction de l’analyse des premiers éléments recueillis ».

Plusieurs sociétés ont vu récemment leurs cours de Bourse manipulés, après la publication de communiqués frauduleux. En novembre, la société américaine Fitbit a été victime d’un faux, qui annonçait une offre de rachat déposée par le fonds chinois ABM Capital.

En 2015, l’entreprise américaine Avon devait démentir une fausse annonce d’une OPA.

En 2013, le groupe australien Whitehaven Coal avait vu temporairement chuter son cours de Bourse, après l’envoi, par des activistes anti-charbon, d’un faux communiqué de presse qui remettait en question la rentabilité de l’un de ses principaux sites miniers.

Enfin, en 2014, un procédé similaire avait fait chuter le cours de Bourse de G4S, une société de sécurité engagée pour garder des camps de réfugiés. Ce document annonçait une révision des comptes de l’entreprise sur un an et demi, ainsi que le licenciement de son directeur financier.