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Les Français vivent en moyenne plus vieux que les habitants des autres pays européens. L’espérance de vie les place dans le peloton de tête, derrière l’Espagne, l’Italie et la Suisse, avec une moyenne – hommes et femmes confondus – de 82,8 ans, contre 80,9 ans chez nos voisins. A l’échelle du continent, les femmes vivent plus longtemps (83,6 ans) que les hommes (78,1), avec un plus fort écart en France (86 ans d’espérance de vie pour les femmes contre 79,5 ans pour les hommes). C’est l’un des enseignements du « Panorama de la santé 2016 », rapport conjoint publié mercredi 23 novembre par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et la Commission européenne. Deux cents pages qui compilent de multiples indicateurs sur l’état de santé des populations des 28 pays de l’Union européenne et l’accès aux soins.

Si la France est reconnue pour la qualité de son système de soins, la prévention reste le parent pauvre, avec seulement 1,9 % des dépenses de santé allouées, contre une moyenne de 3 % pour les pays de l’Union européenne. Les facteurs de risque y sont plus élevés. Le tabagisme a certes diminué dans l’Hexagone ces dernières années, mais reste à des niveaux plus élevés que la moyenne en Europe. En effet, la France compte 22,4 % de fumeurs quotidiens (des études françaises parlent de 28 %), presque le double qu’en Suède (12 %) et bien plus qu’au Royaume-Uni (18 %), selon les chiffres de l’OCDE. De même, en France, près d’un adolescent sur cinq déclare fumer au moins une fois par semaine (un sur sept dans les pays de l’UE).

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Consommation élevée d’alcool

Des taux jugés « alarmants » par les instances européennes. Des mesures de prévention ont été prises, comme le paquet neutre depuis le 21 novembre, ou l’opération Moi(s) sans tabac, calquée sur une initiative britannique, lancée en novembre par Santé Publique France et le ministère de la santé, pour inciter les fumeurs à arrêter pendant au moins trente jours.

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Autre facteur de risque évitable, l’alcool, où la France n’est pas non plus très bonne élève. Certes, les Français boivent moins qu’il y a trente ans, mais leur consommation moyenne de 11,5 litres d’alcool pur par habitant et par an dépasse la moyenne européenne (10 litres). L’OCDE note ainsi qu’il est primordial de poursuivre la limitation des publicités pour les boissons alcoolisées. La France a en outre des niveaux de taxes sur l’alcool, notamment le vin, plus faibles que bien d’autres pays du Vieux Continent. « Des politiques de prévention efficaces doivent être poursuivies sans relâche pour réduire encore plus ces facteurs de risque, notamment chez les adolescents, avant que les mauvaises habitudes ne s’acquièrent », souligne Francesca Colombo, chef de la division de la santé à l’OCDE.

Sur la balance, les Français font plutôt bonne figure. Certes, les taux de surpoids (un enfant sur sept) et d’obésité sont relativement faibles en France par rapport à leurs voisins, mais ils augmentent. La part d’adultes obèses (dont l’indice de masse corporelle, IMC, est égal ou supérieur à 30) a grimpé de 9 % en 2000 à 15 % en 2014 en France (16 % en Europe). Bien mieux cependant qu’au Royaume-Uni (20 %) ou aux Etats-Unis (près de 30 %). La probabilité d’être obèse est deux fois plus élevée pour les personnes ayant un faible niveau d’éducation.

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« Il est donc essentiel de changer les habitudes », a noté Francesca Colombo. Notamment l’activité physique, car seulement 10 % des filles de 15 ans en Europe déclarent faire une activité physique quotidienne modérée à vigoureuse (une heure par jour) – recommandée par l’Organisation mondiale de la santé – contre 20 % des garçons de 15 ans. La France figure en queue de peloton.

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Vaccination insuffisante

Autre indicateur, le pourcentage des personnes de plus de 65 ans vaccinées contre la grippe ne cesse de baisser dans la plupart des pays européens (il est de 53,5 % en moyenne). Il est inférieur en France (48,5 %), où l’épidémie de grippe de forte ampleur en 2015 a entraîné une surmortalité hivernale record de 18 300 décès. Confirmant la défiance des Français à l’égard des vaccins, le taux de vaccination des enfants contre la rougeole est parmi les plus faibles, avec 10 % d’enfants non vaccinés (contre 6 % en Europe).

Si la qualité des soins s’améliore, les inégalités sont criantes entre les pays mais aussi à l’intérieur même de ceux-ci. D’abord lors de l’accès aux soins. De plus en plus de personnes à bas revenus renoncent aux soins, alertent l’OCDE et la Commission européenne. Ainsi, en Grèce, le nombre de personnes qui ne se soignent pas pour des raisons financières a plus que doublé, passant de 7 % à 16 % entre 2008 et 2014. Ensuite, en moyenne dans l’UE, les personnes ayant un niveau d’études plus faible ont une espérance de vie inférieure de sept ans par rapport à celles plus diplômées. On vit en moyenne huit ans de plus dans les pays d’Europe de l’Ouest qu’en Europe de l’Est. L’écart entre les plus pauvres et les plus riches se creuse un peu plus. Il y a donc urgence à avoir « des systèmes de soins primaires (de première ligne, comme le recours au généraliste, pharmacien…) solides pour réduire les inégalités et faire face au vieillissement de la population », pointe l’OCDE, alors que les plus de 65 ans devraient atteindre 30 % en 2060 (contre 20 % en 2015).

De plus, « de meilleures politiques publiques de santé et de prévention pourraient contribuer à sauver des centaines de milliers de vies et à économiser plusieurs milliards d’euros chaque année en Europe », affirme l’OCDE. Selon ses estimations, le décès prématuré de 550 000 personnes d’âge actif des suites de maladies chroniques (crises cardiaques, AVC, diabète, cancer) représente une « tragédie humaine », mais coûte 115 milliards d’euros (dont 12,8 milliards pour la France) par an aux pays de l’Union européenne, soit 0,8 % du PIB.

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