Laboratoire de recherche sur le cancer, à Oxford, en Grande-Bretagne, en novembre 2016. | © Peter Nicholls / Reuters / REUTERS

Le cancer est un des grands enjeux de santé publique du XXIe siècle, amplifié par l’allongement de l’espérance de vie mais aussi par les modifications de notre environnement. De nos jours, de nombreux patients peuvent être pris en charge efficacement grâce à la mise en place de dépistages précoces et à une recherche active quant aux traitements de la maladie. Cependant, la généralisation métastatique, c’est-à-dire l’apparition de tumeurs secondaires, reste souvent synonyme de pronostic pessimiste pour le patient.

La prise de décision thérapeutique est un processus complexe et, malgré les progrès incessants, notamment dans le domaine de l’imagerie médicale, les outils d’analyse dont dispose le clinicien sont peu nombreux et ne permettent généralement pas d’anticiper le développement de la maladie.

L’objectif de ces travaux est justement de mettre au point des outils mathématiques basés sur la modélisation de la maladie et l’exploitation des images médicales afin de suivre, voire de prédire, l’évolution de tumeurs.

Afin de décrire ou modéliser au mieux la maladie, nous avons élaboré un modèle d’équations reliant l’évolution de la densité de cellules tumorales à différents phénomènes biologiques (prolifération, approvisionnement en nutriments, réponse à certains traitements) ainsi que mécaniques (pression dans les tissus), et ce, dans chaque pixel de l’image médicale. Nous sommes ainsi capables de simuler numériquement l’image 2D ou 3D obtenue au scanner et même de produire des prédictions de l’évolution future du cancer. Comme chaque patient et chaque lésion sont différents, le modèle doit être personnalisé. Pour cela, nous utilisons une méthode combinant la minimisation de l’erreur entre les simulations et l’image observée et un algorithme d’apprentissage automatisé. Cette seconde étape nous permet de tirer parti de la richesse de notre base de données de cas cliniques.

Ces « scanners virtuels » produits par notre méthode peuvent permettre au clinicien d’anticiper les possibles évolutions de la maladie et d’adapter ses décisions : planification d’examens de contrôle, de traitements, et de suivi de la réponse aux traitements.

Les premiers résultats, pour l’instant limités à certains types de tumeurs (métastases pulmonaires et méningiomes principalement), sont très encourageants. Sur une base de données de 37 lésions, l’erreur moyenne des prédictions sur l’évolution de la masse tumorale à quelques mois est de 13 %, soit comparable à l’erreur de mesure des médecins quand ils ont la tumeur sous les yeux.

Julien Jouganous

« Modélisation et simulation de la croissance de métastases pulmonaires » : thèse soutenue le 23 Septembre 2015. Directeur de recherche : Olivier Saut. Mathématiques, Université de Bordeaux.