Lors du tournage,Bernie Bonvoisin en compagnie de réfugiés syriens. | Premières lignes télévision

C’est tout à l’honneur de la chaîne, en l’occurrence LCP, que de programmer chaque soir à 20 h 30, un documentaire de qualité suivi d’un débat animé par Jean-Pierre Gratien. Ce rendez-vous quotidien s’intéresse aussi bien à la jeunesse des banlieues qu’à Vladimir Poutine, le camp de Guantanamo, Emmanuel Macron ou les syndicats français, pour ne rappeler que certains épisodes marquants. A l’occasion de son centième numéro, « Droit de suite »propose un rendez-vous chargé en émotions : le Liban et ses camps de réfugiés. Le sujet : faire parler les enfants syriens de leur vie. Le confesseur : Bernie Bonvoisin, ancien chanteur du groupe Trust devenu acteur, réalisateur, écrivain et scénariste.

Durant vingt-cinq jours, il a tourné au Liban, de Beyrouth à Tripoli, dans la plaine de la Bekaa, de la montagne enneigée libanaise à la montagne aride syrienne. Grâce à l’aide de la journaliste Jeanine Jalkh, Bernie Bonvoisin a pu rencontrer Maria Assi, directrice de l’association Beyond, ainsi que des enfants ayant vécu des expériences souvent traumatisantes dans leur pays natal.

Témoignages choc

« Les cinq dernières années passées chez moi, à voir le peuple syrien se faire laminer dans un silence terrifiant, cela me révoltait. Mais ce n’était rien comparé au fait d’être confronté aux êtres », résume le réalisateur. Les paroles recueillies, les regards des gosses, leur « effrayante maturité » donnent à ce documentaire toute sa force. Plaquant sur ces images un texte rageur, Bernie Bonvoisin y va franco. « J’y ai vu l’esclavage, la malnutrition, la crasse… mais aussi la lumière. »

Dans la boue, les lumières crues du petit matin, les tentes de fortune de ces camps, le réalisateur fait parler des gosses de 9 à 13 ans. Chaque témoignage est un choc : envie de retour au pays, souvenirs de guerre ou d’un doux passé révolu, bouffées de tristesse en évoquant l’absence de proches, rien n’est éludé. Dans cet univers où la pauvreté n’a plus de seuil, des cours de théâtre sont donnés par des volontaires pour libérer la parole d’enfants grandis trop vite. Et des professeurs dévoués font en sorte que cette génération d’enfants des camps, filles et garçons mélangés dans des classes de fortune, soit éduquée. « Ma colère se mêle aujourd’hui à ma honte », lance Bernie Bonvoisin.

« Paroles d’enfants syriens. La misère entre deux jardins »,de Bernie Bonvoisin et Pedro Brito Da Fonseca (Fr., 2016, 52 min).