Une personne utilise une tablette près d'une déclaration papier des revenus de l'année 2012. | DAMIEN MEYER / AFP

Payer ses impôts en ligne, accéder sur Internet aux informations sur sa retraite ou sur ses droits en terme de protection sociale. Oui mais à quel prix ? Si pour la plupart des usagers le service offre un gain de temps, nombreux sont ceux pour qui ces mutations sont sources de difficultés…

A l’occasion de la publication du 16e baromètre du numérique, mardi 29 novembre, le secrétariat d’Etat à l’économie numérique a annoncé des mesures en faveur de l’inclusion numérique. Celles-ci visent à favoriser par un document cadre les politiques locales en matière de médiation numérique, et à leur offrir les moyens de se financer, notamment par la création d’un dispositif de « chèque numérique » qui pourrait être abondé par tous les grands services engagés dans des processus de dématérialisation.

L’agence du numérique, dont c’est une des missions, est à l’avant-poste de cette mission pour « l’acculturation numérique ». Son directeur, Antoine Darodes, en convient : « 2016 a été l’année de la dématérialisation d’un certain nombre de services publics, et ce mouvement va s’approfondir en 2017. Face à cela nous avions une offre d’accompagnement pas assez visible ou structurée. Il fallait mener de front ces deux chantiers. »

Mises à l’écart

Selon les chiffres publiés mardi, la part de la population qui accomplit des démarches administratives et fiscales a bondi de 9 points en 2016 pour atteindre 62 %. Pour autant, 40 % des personnes interrogées par le Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Credoc) voient avec défiance le passage au tout numérique de ces démarches essentielles (enquête menée auprès d’un échantillon représentatif de 2 213 personnes de 12 ans et plus). Outre les personnes âgées, qui n’ont pas été bercées dans cette culture (72 % des plus de 70 ans sont inquiets du passage au tout numérique), les populations peu éduquées sont mises à l’écart par ces outils numériques : 68 % des non-diplomés et 47 % des personnes n’ayant que le BEPC sont effrayées par le passage au tout numérique.

« On n’est pas en avance, c’est un défi qui est permanent. Maintenant on a réussi en un an à faire émerger la problématique et à structurer ces acteurs de la médiation numérique », soutient Antoine Darodes. Parmi les actions récentes soulignées figure d’ailleurs la création d’une coopérative des acteurs de la médiation numérique, dont l’Agence du numérique veut faire un interlocuteur privilégié à qui il souhaite pouvoir assurer un « financement pérenne »

La question n’est pas nouvelle pour le gouvernement. Plusieurs membres du Conseil national du numérique – qui avait produit un rapport sur le sujet en 2013 – déploraient dans une tribune publiée dans Libération le 22 novembre, que « les enjeux d’inclusion numérique ne sont aujourd’hui pas suffisamment pris en compte dans nos politiques publiques » tout en admettant que « le portage politique de ces questions par les pouvoirs publics centraux et locaux s’est amélioré ces dernières années ». En avril des entreprises (dont Google) et des associations (dont Emmaüs Connect) mettaient en garde dans Le Monde contre « ces services 100 % en ligne [qui] font vaciller le pacte républicain pour tous ceux qui sont éloignés d’Internet ».