Au Grand-Palais, le 28 novembre. | MARTIN BUREAU / AFP

Face à un roi de la communication (et des ventes) comme Victoria’s Secret, la lingerie française peut sembler bien discrète… L’américain, dont le chiffre d’affaires a atteint 7,23 milliards d’euros en 2015, réalisé principalement aux Etats-Unis, s’apprête à enregistrer son défilé, mercredi 30 novembre, pour la première fois à Paris. Sa diffusion, suivie chaque année par environ 8 millions de téléspectateurs, est fixée au 5 décembre sur CBS. Cette superproduction s’accompagne d’un concert avec Lady Gaga et réunit une dizaine des plus beaux top models du monde (Jasmine Tookes portera le fameux « Fantasy Bra » à 3 millions d’euros). Faut-il y voir la volonté de Victoria’s Secret de s’attaquer au marché français ? Le groupe admet vouloir se déployer à l’international sans viser particulièrement le Vieux Continent (il est déjà présent en Grande-Bretagne).

« Contrairement à Victoria’s Secret, notre notoriété n’est pas mondiale. On doit faire la différence par notre créativité », explique Laurent Milchior, PDG d’Etam, qui vise une centaine d’ouvertures de boutiques dans le monde à partir de 2017. Le groupe familial (924,3 millions de chiffres d’affaires au 30 septembre) a bousculé les codes il y a neuf ans avec sa marque Undiz destinée aux 15-25 ans. Il y a deux ans, sa « Undiz Machine » a réveillé la vente au détail avec une boutique de 42 m2 à Toulouse. Le principe (dupliqué depuis à Paris) : des bornes en magasin pour sélectionner les produits, et des préparateurs de commandes en sous-sol. En moins d’une minute, les produits sont acheminés à la surface par des tubes à air comprimé. « Le chiffre d’affaires est supérieur à celui d’un magasin classique de 150 m2. Ce modèle nous permet de créer des entrepôts locaux, utiles pour le commerce en ligne », précise M. Milchior.

Les marques traditionnelles n’ont pas dit leur dernier mot

Undiz cherche, comme Etam, à déployer son réseau à l’international. La marque a lancé en novembre une « Undiz Academy » pour recruter par concours sur les réseaux sociaux des ambassadeurs-entrepreneurs. Les meilleurs (sélectionnés à partir du 1er décembre) ne seront plus que sept le 17 janvier 2017. Rémunérés 40 000 euros par an, ils seront installés à Paris et auront un budget de 300 000 euros pour développer l’e-commerce de la marque sur le marché de leur choix.

L’italien Calzedonia vient, quant à lui, de lancer en avant-première ses tout premiers collants conçus pour être portés avec des baskets et tapisse les murs et Abribus de l’Hexagone avec la première campagne d’affichage de sa marque Intimissimi. Celle-ci accompagne l’ouverture parisienne d’une double boutique Calzedonia-Intimissimi, rue du Four, le 13 décembre.

Face à ces distributeurs dynamiques, les marques traditionnelles de corseterie française n’ont pas dit leur dernier mot. D’ailleurs, le marché français de la lingerie (en croissance de 1,7 % en 2015 à 2,8 milliards d’euros) se porte plutôt mieux que celui du prêt-à-porter. « Sur quoi faire la différence dans un monde où tout est jetable et pas cher ? interroge Jean d’Arthuys, président de Maison Lejaby. On a choisi de ne faire aucun compromis sur la création et les matières en gardant une usine à Lyon notamment. On ouvre aussi quelques points de vente en propre, cela nous aide à reprendre la main sur notre image. » Et l’image de Lejaby a changé. Les soutiens-gorge à 90 euros de la maison semblent occuper à propos un créneau délaissé, celui d’une modernité qualitative. Ils sont d’ailleurs référencés chez les prestigieux Selfridges à Londres, Isetan au Japon et Neiman Marcus à New York.