Mardi 29 novembre, Jack Lang a annoncé le lancement d’un « fonds international dédié à la protection du patrimoine en danger dans les zones en conflit » à l’occasion de la conférence sur le patrimoine en péril, qui se tiendra à Abou Dhabi les 2 et 3 décembre. Une sorte de plan Marshall international porté par François Hollande et Mohammed Ben Zayed Al-Nahyan, prince héritier de l’émirat, dans le contexte de l’ouverture du Louvre Abou Dhabi, prévue en 2017.

« Représentant personnel » de François Hollande pour l’organisation de ladite conférence, le président de l’Institut du monde arabe (IMA) espère réunir cent millions de dollars pour ce fonds en mobilisant Etats et fondations privées. C’est, pour Jack Lang, « l’une des clefs du succès de la conférence afin d’agir en prévention et tout au long du processus pour sauver ce qui appartient au Patrimoine de l’humanité. La France, premier contributeur, apporte trente millions de dollars, avec autorisation d’engagement dans sa loi des finances de décembre. Chine, Corée et Japon seraient aussi partants », indique-t-il, revenant d’une tournée en Asie et Extrême-Orient. La fédération des sept Emirats arabes unis, dont Abou Dhabi (85 % du territoire) est la capitale, pourrait donner quinze millions d’euros.

La Syrie, grande absente

L’entité internationale pour la collecte de fonds sera une fondation de droit helvétique (sur le modèle du Fonds mondial pour le sida), siégeant à Genève, avec un « secrétariat très restreint, l’argent devant servir aux actions de prévention, de restauration et à l’ensemble de la chaîne, formations, plans de sauvegarde, inventaires, numérisation des archives, mise à l’abri, réhabilitation, etc. Seul son responsable devrait être rémunéré », note Jack Lang.

La directrice générale de l’Unesco, Irina Bokova, et les institutions onusiennes des musées et des sites (ICOM, Iccrom et Icomos) interviendront, à Abou Dhabi, dans les débats. Quarante pays sont conviés à la conférence, avec l’Afghanistan, l’Irak, le Mali et le Yémen. L’Arabie saoudite aussi, qui est à la tête d’une coalition internationale responsable des dégâts sur le patrimoine yéménite. La Syrie sera la grande absente. « La France n’a plus d’ambassadeur à Damas », argumente Jack Lang, parlant de « guerre à outrance contre un peuple », d’Alep « livrée à une véritable barbarie ». « Comment ne pas en tenir compte, même si certains responsables syriens font de leur mieux pour mettre à l’abri les œuvres ? », explique-t-il. Un pont culturel coupé, une première avec un pays où la France maintenait depuis des décennies vingt missions sur les sites majeurs.

La proposition de créer des lieux « refuges » pour les œuvres menacées, en les sécurisant dans le pays victime ou dans un pays d’accueil temporaire, laisse dubitatifs archéologues et experts du patrimoine. Le 3 décembre à Abou Dhabi, le Conseil de sécurité devrait être saisi d’un projet de résolution.