Les quatorze membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), réunis mercredi 30 novembre à Vienne, sont finalement parvenus à un accord de baisse de leur production d’or noir, selon deux sources au sein du cartel. Ces pays, qui assurent un tiers de la production mondiale d’or noir, cherchaient depuis des mois à faire remonter les prix, tombés de 114 dollars (108 euros) le baril mi-2014 à moins de 50 dollars aujourd’hui.

Le baril de brent de la mer du Nord coté à Londres s’est immédiatement apprécié, repassant au dessus de la barre des 50 dollars (+ 8 %) quelques minutes après cette annonce qui doit néanmoins être officiellement confirmée par le secrétaire général de l’OPEP. A New York, le Light Sweet Crude (WTI), référence américaine du brut, prenait 3,62 dollars (+ 8 %) et atteignait 48,85 dollars sur le contrat pour livraison en janvier

Geste de bonne volonté

C’est la première baisse décidée par l’OPEP depuis la fin de 2008, quand la crise financière post-Lehman Brothers avait entraîné un effondrement des cours, tombés de 147 dollars à environ 35 dollars entre août et décembre 2008.

Les membres de l’OPEP étaient tombés d’accord fin septembre, à Alger, pour ramener la production quotidienne jusqu’à 32,5 millions de barils. Les sources citées par les agences de presse indiquent que le chiffre retenu à Vienne est conforme à l’accord de principe signé dans la capitale algérienne. Ce qui devrait entraîner une baisse de 1,2 million de barils par jour.

Qui y participera ? Il semble que l’Arabie saoudite, chef de file du cartel, soit prête à ramener sa production de 10,5 à 10 millions de barils par jour. Dans un geste de bonne volonté, elle aurait accepté que l’Iran pompe jusqu’à 3,9 millions de barils, peu ou prou le niveau que la République islamique avait atteint avant l’embargo occidental décrété en 2012 pour la sanctionner sur son programme nucléaire.

Libye et Nigeria exemptés

L’Irak, deuxième producteur de l’OPEP, devra faire un effort tout comme les pétromonarchies du golfe arabo-persique, l’Algérie, l’Angola ou le Venezuela, qui est pourtant en plein chaos économique. En revanche, la Libye ébranlée par une guerre civile et le Nigeria en but à des attaques sur ses installations pétrolières du delta du Niger ont été exemptés de l’effort.

L’OPEP va aussi demander aux pays non-membres de l’organisation de porter une partie du fardeau, estimé à environ 600 000 barils par jour. Notamment la Russie, premier producteur mondial avec plus de 11 millions de barils. Elle s’est dit prête à « geler » sa production à son niveau actuel, qui n’a jamais été aussi soutenue depuis la chute de l’URSS, voire à la réduire légèrement si un accord préalable était trouvé au sein de l’OPEP.

Après un premier échec à Doha (Qatar), mi-avril, les membres du cartel pétrolier ne pouvaient pas se séparer sur un nouvel échec. Il aurait probablement précipité la chute des cours dans les prochaines semaines et montré que l’OPEP avait définitivement perdu la main sur les marchés.

On ignore encore quand l’offre et la demande se rejoindront pour rééquilibrer les marchés, bousculés depuis cinq ans par l’afflux massif du pétrole de schiste (shale oil) américain. La consommation devrait être relativement soutenue en 2017 avec une hausse d’environ 1,5 million de barils par jour.

Peu de marges de manœuvre

Les pays producteurs n’ont plus beaucoup de marges de manœuvre pour pomper davantage de brut et le marché pourrait se rééquilibrer. C’est l’analyse du ministre saoudien de l’énergie, Khaled Al-Faleh, qui assure que le marché se serait rééquilibré de lui-même en 2017, même sans accord à Vienne.

Les analystes des grandes banques impliquées dans le commerce du brut ne paniquent pas non plus. Dans une note publiée la veille du sommet de l’OPEP, Morgan Stanley estimait que les prix oscilleront entre 40 dollars et 55 dollars durant une bonne partie de 2017. Goldman Sachs prévoit de son côté un prix moyen de 45 dollars jusqu’à l’été.

Il faudra avoir le détail de l’accord pour être certain qu’il aura un effet durable sur les prix. Rien n’est moins sûr. Certains membres de l’OPEP peuvent être tentés de contourner discrètement l’accord. Et au-delà de déclarations de principe, la Russie n’a jamais vraiment respecté ses engagements.