Tanguy De Lamotte , le 1er novembre, peu avant le départ du Vendée Globe. AFP PHOTO / JEAN-SEBASTIEN EVRARD | JEAN-SEBASTIEN EVRARD / AFP

Tanguy de Lamotte, 38 ans, a pris pour la deuxième fois le départ du Vendée Globe, le tour du monde à la voile, en solitaire, sans escale et sans assistance. Une avarie l’a contraint à faire demi-tour, le 15 novembre, puis à l’abandon. Il raconte

Comment êtes-vous devenu skipper ?

Complètement par hasard. Longtemps, je me suis imaginé pilote d’essai. Jusqu’au jour où j’ai participé à ma première régate, le Trophée des lycées, alors que j’étais en 2de à Versailles. Mis à part quelques bords tirés sur le bateau de mon grand-père et une poignée de cours payés par ma grand-mère, je n’avais aucune réelle expérience de la voile, ce qui ne m’a pas empêché de me retrouver skipper d’un bateau de 8 mètres à 15 ans. Une fois mon bac S en poche – que j’ai eu au rattrapage avec 5 en maths ! – et le test IELTES (International English Language Testing System) passé en candidat libre, j’ai rejoint l’école d’architecture navale de Southampton, en Angleterre. J’y ai appris à dessiner des coques, des ponts, des voiles, en tenant compte de la flottabilité et de la résistance des matériaux. Imaginer le design d’un bateau pour qu’il soit le plus rapide possible, c’est passionnant, d’autant que je suis fou de techniques de pointe ! Très vite, je n’ai eu qu’une idée en tête : mettre toutes ces connaissances en pratique sur mon propre bateau, dès la sortie de l’école.

Comme ingénieur naval ou skipper professionnel ?

Pendant mes études, j’ai eu la chance de croiser par hasard Ellen MacArhur. Elle préparait le Vendée Globe au moment où je terminais mon diplôme en trois ans [quatre ans aujourd’hui]. J’ai rejoint son équipe technique comme préparateur. Je travaillais plus de dix heures par jour mais c’était passionnant. J’ai appris des tas de choses, acquis de l’expérience et pu naviguer sur des bateaux formidables.

J’ai véritablement commencé ma vie professionnelle comme ingénieur chez Karver, une entreprise d’accastillage basée à Honfleur. Comme j’étais salarié à mi-temps, j’ai pu dessiner puis fabriquer mon propre bateau. En 2003, j’ai mis ma première embarcation à l’eau. Elle mesurait 6,5 mètres de long et m’a permis de terminer 7e de la Mini Transat en 2005. Ce qui n’est pas si mal ! Après quoi, je suis passé à la taille au-dessus : un class 40 de 40 pieds, avec lequel j’ai gagné plusieurs courses : le Mondial Class 40, en 2008, et la Fastnet Race, en 2009 et 2011.

En 2012, pour la première fois, lors du Vendée Globe, je me suis lancé dans une course avec un bateau que je n’avais pas construit moi-même. Et comme j’en garde un assez bon souvenir, j’ai récidivé cette année.

Skipper, c’est vraiment un métier ?

Skipper est devenu mon métier depuis le Vendée Globe en 2005. Quand je ne suis pas en course, j’entretiens mon bateau, je fais du sport, je me forme à la météo. Je dois également m’occuper des relations avec les partenaires et les médias. Le reste du temps, je navigue. Mais pour moi, c’est une parenthèse. Un jour, je redeviendrai architecte.

Propos recueillis par Isabelle Dautresme