Dans un rapport récent, rédigé en novembre et évoquant les changements du mode opératoire de l’organisation Etat islamique (EI), Europol affirme que de nouveaux attentats de la mouvance islamiste pourraient survenir en Europe et que l’usage de voitures piégées est désormais à redouter. C’est cette technique que les terroristes de Molenbeek impliqués dans les attaques du 13 novembre 2015 à Paris et du 22 mars à Bruxelles et Zaventem avaient d’ailleurs envisagée dans un premier temps, affirme l’office policier européen.

Ces informations semblent confirmées par des données retrouvées dans un ordinateur saisi à Schaerbeek après les attentats du métro Maelbeek et de l’aéroport de Bruxelles. Le groupe qui a commis les deux attaques (32 morts au total) aurait changé ses plans en dernière minute après une opération policière à Forest, le 15 mars. Salah Abdeslam était parvenu à échapper à cet assaut, protégé par l’un de ses complices qui allait être abattu. Le groupe aurait, en conséquence, hâté son projet initial – des attentats à la voiture piégée à Paris ou dans une autre ville française.

La France principalement visée

Les experts européens, qui centralisent les données fournies par différents services de renseignement, insistent sur le risque de nouvelles actions sanglantes sur le territoire des pays membres de la coalition internationale qui bombarde les positions de l’EI en Syrie et en Irak. La France serait principalement visée, estiment-ils. En raison de son rôle militaire mais également parce qu’elle est « le symbole de la culture occidentale », qu’elle possède « une forte tradition séculaire » et qu’elle a adopté des mesures « vues comme ciblant spécifiquement les musulmans », dont l’interdiction du voile.

D’autres Etats seraient visés, dont la Belgique, un pays décrit comme l’« abri de milieux radicalisés » et qui fournit, proportionnellement à sa taille, le plus grand nombre de combattants étrangers (560 de ses ressortissants ont rallié des groupes terroristes). L’Allemagne risquerait, elle aussi, de nouveaux attentats, notamment parce que des recruteurs y ciblent les nombreux réfugiés syriens : les services allemands ont répertorié au moins 300 tentatives d’embrigadement au cours des derniers mois. Le Royaume-Uni et les Pays-Bas pourraient également être visés par de nouveaux attentats, indique le rapport.

Europol, doté récemment de nouveaux moyens et de compétences étendues dans l’antiterrorisme, avance que des djihadistes pourraient aussi recourir, à l’avenir, à l’usage d’armes chimiques ou biologiques. L’EI a notamment déjà usé de gaz moutarde en Syrie et serait en mesure de produire cette substance à l’aide d’anciens responsables militaires irakiens. L’organisation terroriste aurait, par ailleurs, eu accès à des sites de stockage, en Irak et en Libye.

Le pire serait peut-être à venir

Europol met en avant le démantèlement, en février 2016, d’un réseau lié à l’EI par les autorités marocaines. La dizaine de membres qui le composait détenait des armes et des explosifs mais également des substances servant à la fabrication d’armes chimiques et biologiques.

Les experts de La Haye, qui soulignent les « efforts énormes » imposés aux services de l’antiterrorisme des différents pays de l’UE – ils ont procédé au total à 667 arrestations en 2015, et 395 en 2014 – jugent toutefois que le pire est peut-être à venir. En raison, notamment, du retour des zones de combat de centaines de combattants et de famille. Ils seraient encore 2 500 à faire partie de l’EI et d’autres organisations, a indiqué à l’agence Reuters le coordinateur européen de l’antiterrorisme, Gilles de Kerchove. « Leur retour représentera un défi sécuritaire de longue haleine », souligne Europol. Qui estime que « même s’il est vaincu en Syrie et en Irak, le groupe continuera à encourager et organiser des attaques dans l’Union européenne ».

L’Office européen ajoute une dernière donnée : le nombre croissant de personnes connues pour des faits de terrorisme et qui ont, par ailleurs, des liens avec des formes graves de délinquance : sur 816 combattants étrangers identifiés durant les six premiers mois de 2016, 67 % avaient eu auparavant des activités criminelles (trafics de drogue, d’armes à feu, d’êtres humains).