Dans un salon tapissé d’estampes japonaises, confortablement installé sur un canapé de style victorien, l’étudiant français Julian Blum, 19 ans, échange avec son professeur d’histoire, Jane Garnett. Ils parlent du libéralisme sur la scène politique anglaise du XIXe siècle. Un débat courtois, presque amical. Ce type de rencontre n’a rien d’exceptionnel à l’université d’Oxford. Il a même lieu toutes les semaines à heures fixes. Et porte un nom : le tutorat.

« Sans le tutorat, Oxford ne serait pas Oxford », estime la porte-parole de l’université, Julia Paolitto.

Autrefois privilège des rois britanniques, le tutorat est au cœur de l’enseignement à Oxford. Si l’université fondée au XIe siècle s’est adaptée aux évolutions de la société, le tutorat a résisté au temps. Et semble avoir de beaux jours devant lui : « Sans le tutorat, Oxford ne serait pas Oxford », estime la porte-parole de l’université, Julia Paolitto.

Cette méthode d’enseignement fonde le prestige de cette université unanimement considérée comme la meilleure au monde : chaque semaine, l’étudiant doit écrire un essai dans sa discipline, puis expose ses arguments lors d’un débat en tête-à-tête ou en petits groupes avec son tuteur. Cette culture de l’échange oratoire « encourage les étudiants à apprendre de manière active », estime le professeur d’italien Eleanor Parker. Pour Julian, c’est surtout l’occasion « d’échanger directement avec un enseignant », plutôt que par l’entremise d’une copie.

La France en septième position

Julian Blum est un des rares étudiants français à Oxford. En 2015, 170 d’entre eux ont envoyé leur candidature au niveau licence, mais seulement 15 ont été admis, soit 9 %. C’est bien peu au regard des 3 200 places offertes.

Avec au total 299 étudiants français sur le campus, la France n’arrive qu’en 7e position, après le Canada (6e, 374 étudiants), l’Italie (5e position, 378 étudiants), l’Allemagne (3e, 837 étudiants) et les Etats-Unis (premiers avec 1 441 étudiants). Le nombre d’étudiants français augmente néanmoins chaque année : 299 en 2015, contre 206 en 2010, mais il se pourrait que cette tendance favorable soit remise en cause par le Brexit.

« Je suis un privilégié », admet sans détour Julian. Selon lui, si l’école active bilingue Jeannine-Manuel de Paris ne l’avait pas guidé dans le labyrinthe de la procédure d’admission, sa candidature n’aurait pas été retenue, malgré son 19,2 de moyenne au bac option internationale :

« Mon établissement m’a entraîné aux épreuves écrites et orales, et s’est chargé de construire mon dossier de candidature », précise Julian.

Surtout, l’école bilingue l’a aidé à choisir un collège parmi les trente-huit qui forment l’université d’Oxford. Ce sont eux qui décident de l’admission des futurs étudiants. Si en 2015, 18 % des élèves ont envoyé leur candidature à l’université sans faire de choix, la plupart se tournent directement vers un collège.

Creuset des élites

Encore faut-il savoir lequel. Ils enseignent presque les mêmes disciplines, offrent la même excellence académique et délivrent tous un diplôme estampillé Oxford. « Certains jouissent d’une meilleure réputation, liée à l’ancienneté, la richesse et aux personnalités qui les ont fréquentés », explique Julian, qui les compare aux différentes « maisons » de Poudlard dans Harry Potter.

« Beaucoup d’étudiants ici ont des parents diplômés d’Oxford, observe Julian, c’est un environnement stimulant, mais la culture de l’entre-soi est parfois un peu étouffante. »

D’ailleurs, la grande salle où dînent l’apprenti sorcier et ses acolytes dans la série de films s’inspire directement du réfectoire de style Renaissance de Christ Church. Célèbre pour sa splendeur architecturale, ce collège abrité dans une ancienne propriété du roi Henri VIII a formé treize premiers ministres britanniques et sa cathédrale est également depuis le XVIe siècle celle des évêques du diocèse d’Oxford.

Christ Church n’est pas le seul collège dont la gloire égale presque celle de l’université. Trinity et Magdalen jouissent aussi d’une certaine renommée internationale. Mais la notoriété de beaucoup d’autres ne s’étend pas au-delà du réseau des anciens d’Oxford :

« Beaucoup d’étudiants ici ont des parents diplômés d’Oxford, observe Julian, c’est un environnement stimulant, mais la culture de l’entre-soi est parfois un peu étouffante. »

Pourtant, l’université s’est depuis longtemps ouverte à la diversité. En 2015, parmi les nouveaux étudiants admis d’origine britannique, 34,4 % (893 étudiants) souffraient d’un handicap, étaient issus d’un milieu social défavorisé ou d’un quartier avec peu de diplômés de l’enseignement supérieur. Oxford reste le creuset des élites intellectuelles, mais le recrutement et l’enseignement se sont ouverts sur le monde, ce que confirme d’ailleurs sa place dans les classements internationaux.

S’inscrire à Oxford

Conditions d’entrée. Les élèves ayant étudié en France doivent avoir obtenu au moins 16 sur 20 de moyenne au bac. Ceux qui n’ont pas passé le bac option internationale ou ne sont pas scolarisés dans un établissement anglophone devront justifier d’une bonne maîtrise de l’anglais (un score minimum de 7 au test de l’IELTS et de 110 au TOEFL).

Dossier de candidature. Les élèves doivent remplir un dossier de candidature sur le portail UCAS un an avant la date du début de l’année universitaire. Le dossier doit inclure une lettre de motivation, une lettre de recommandation et une copie des bulletins scolaires du lycée.

Etapes supplémentaires. Les élèves envoient un travail qu’ils ont écrit dans le cadre de leur scolarité et qui a été noté par un de leurs professeurs. En fonction de la discipline qui les intéresse à Oxford, certains passent aussi une épreuve écrite, d’autres non. Tous les étudiants admissibles sont conviés à un entretien qui prend généralement la forme d’une conversation avec un tuteur.