Le 5 décembre, à Acapulco, le leader spirituel Sri Sri Ravi Shankar a partagé une courte méditation collective avec les 4 000 Mexicains venus l’écouter. | Adriana Covarrubias/Notimex

« Le criminel ne naît pas violent, il le devient à cause des circonstances, du stress et de la victimisation. » Tel est en substance le message que Gurudev Sri Sri Ravi Shankar est venu apporter au Mexique. Invité dans le sud-ouest du pays par l’État du Guerrero, meurtri par la violence sanguinaire des narcotrafiquants, le maître spirituel a été accueilli le 2 décembre au son des guitares et des trompettes des Mariachis par des centaines de fidèles à l’aéroport de Mexico avant de s’envoler pour Acapulco. La célèbre station balnéaire de la côte pacifique est devenue l’une des villes les plus dangereuses du monde.

Le 5 décembre, le gourou indien au regard lumineux et à la voix juvénile, a réuni 4 000 habitants sur la plage principale de la cité portuaire. S’avançant sur un podium blanc édifié sur le sable, le sexagénaire a fendu le foule, émue, qui levait les mains pour le saluer ou le photographier. « Je vous propose de fonder une grande famille et de travailler ensemble pour changer la société. La paix intérieure est nécessaire à la paix extérieure. » Les paroles du maître, empreintes de douceur et d’amour, ont été accueillies par des applaudissements soutenus.

350 millions d’adeptes dans le monde

Accompagné sur scène par l’archevêque d’Acapulco, le gouverneur du Guerrero et son épouse, le guide humaniste a appelé les Mexicains à consacrer une heure par jour à la création d’« un Mexique meilleur ». Celui que ses proches appellent « Guruji » (« petit maître » en sanskrit) a aussi mené une courte méditation collective, demandant à la foule de placer les doigts derrière la tête pour se détendre, avant d’entrer dans un voyage intérieur « de l’esprit au cœur ».

Le guide humaniste était accompagné sur scène par l’archevêque d’Acapulco, le gouverneur du Guerrero et son épouse. | Adriana Covarrubias/Notimex

C’est à l’âge de 26 ans que Sri Sri Ravi Shankar a inventé sa technique de respiration et de méditation, baptisée « Sudarshan Kriya ». Cette méthode provoquerait un état de bien-être en permettant au corps de sécréter plus de sérétonine, l’hormone du bonheur, tout en limitant sa production de cortisol, l’hormone du stress. 350 millions de personnes ont suivi les programmes dispensés par sa fondation, The Art of Living, présente dans plus de cent cinquante pays.

« Les gouvernements dépensent des milliards en armes alors qu’ils devraient enseigner aux gens à libérer le stress qui les rend violents. » Sri Sri Ravi Shankar

C’est sa renommée qui a convaincu le gouverneur du Guerrero, Héctor Antonio Astudillo Flores, de faire appel à lui pour tenter de mettre fin à la guerre des cartels qui ensanglante son État. Avec six meurtres en moyenne par jour, cette région stratégique de la production et du trafic de drogue est la plus violente du pays, malgré la présence de l’armée dans les rues.
« Les gouvernements dépensent des milliards en armes alors qu’ils devraient enseigner aux gens à libérer le stress qui les rend violents, enseigne le gourou. Le Sudarshan Kriya canalise les pensées négatives, comme la dépression, l’égoïsme, la jalousie ou les tendances suicidaires, qui favorisent la consommation de drogue et la criminalité. »

Une méthode prometteuse

Le maître, qui a visité un centre de désintoxication à Acapulco et une prison à Mexico, a demandé aux autorités de faciliter l’accès de ses instructeurs à des narcotrafiquants, détenus ou non. « Comme Bouddha, nous aidons les prisonniers à équilibrer leur esprit et leurs émotions, a-t-il confié au Monde. En chaque agresseur, il y a une victime. »

Visiblement, sa méthode a l’air prometteuse : Sri Sri Ravi Shankar était à Bogota, le 30 novembre, pour la ratification de l’accord de paix entre le gouvernement et les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC), qui a mis fin à cinquante-deux ans de conflit. Cet été à Cuba, le gourou avait joué les médiateurs, réussissant à convaincre les négociateurs des FARC d’apprendre à méditer.

Après la Colombie et le Mexique, Sri Sri Ravi Shankar poursuivra sa croisade latino-américaine pour la paix au Guatemala, au Salvador, au Venezuela puis au Brésil. Sa méthode suffira-t-elle à instaurer la non-violence dans des sociétés minées par le crime organisé et la corruption ? Pour Beatriz Goyoaga, coordinatrice de la fondation The Art of Living en Amérique latine, « Guruji vient semer une graine dans l’esprit des gens qui pensent qu’il n’y a pas de sortie au cercle vicieux de la violence ».