Paul Ryan, le 29 avril 2015 à Washington. | ANDREW HARNIK / AP

Les chefs du Congrès américain ont annoncé lundi 12 décembre le lancement prochain d’une enquête parlementaire sur les interférences russes dans l’élection américaine. Dans un rapport secret, révélé vendredi par The Washington Post, la CIA conclut que Moscou était intervenu par ses cyberattaques dans la campagne présidentielle dans le but précis d’aider Donald Trump à être élu, et non plus généralement pour troubler le bon déroulement du scrutin.

Mais le successeur de Barack Obama, qui prendra ses fonctions le 20 janvier, rejette avec force cette conclusion, jetant l’opprobre sur un service de renseignement à la réputation entachée par ses rapports erronés après le 11 septembre 2001 sur les liens entre Saddam Hussein et Al-Qaida. M. Trump l’a dit à plusieurs reprises en interviews, et à nouveau sur Twitter lundi :

(Traduction : « A moins que vous ne preniez les hackers en flagrant délit, il est très difficile de déterminer qui a piraté. Pourquoi cela n’a-t-il pas été publié avant l’élection ? »)

En octobre, les services de renseignement américains ont collectivement accusé la Russie d’avoir piraté des partis politiques dans le but d’interférer dans l’élection.

Des messages internes au Parti démocrate ont été dérobés puis diffusés en juillet, conduisant à la démission de la présidente de la formation. Dans les dernières semaines avant le vote, des milliers de messages du président de l’équipe de campagne de Hillary Clinton ont été publiés par WikiLeaks, jetant une lumière crue sur les délibérations internes. A l’inverse, aucun message du parti républicain n’a été publié.

A Moscou, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a dénoncé lundi « des accusations gratuites, non professionnelles qui n’ont rien à voir avec la réalité ».

« Les Russes ne sont pas nos amis »

Depuis un mois, nombreux sont les parlementaires démocrates mais aussi républicains qui n’entendaient pas tourner la page de l’élection si facilement. Barack Obama a commandé une analyse complète des attaques informatiques de la campagne.

Mais les sénateurs républicains très influents John McCain et Lindsey Graham, ennemis de Moscou, ainsi que les démocrates Chuck Schumer et Jack Reed ont lancé ce week-end un appel retentissant à mener une enquête parlementaire, avec des auditions publiques, pour établir comment et pourquoi Le Kremlin serait intervenu dans l’élection.

Leur appel a été entériné lundi par les deux républicains qui détiennent les clés du Congrès, mais avec un important bémol : ils ont enterré l’idée d’une grande commission d’enquête spéciale sur le modèle de ce qui fut constitué pour le 11-Septembre, composée d’élus des deux chambres, ce qui aurait donné plus de poids aux travaux.

« Les Russes ne sont pas nos amis », a déclaré le chef de la majorité du Sénat, Mitch McConnell, lors d’une conférence de presse. « Toute intervention étrangère dans nos élections est entièrement inacceptable. Et toute intervention de la Russie est particulièrement problématique car, sous le président Poutine, la Russie a été un agresseur, constamment en train de saper les intérêts américains », a renchéri Paul Ryan, président de la Chambre des représentants.

Les deux hommes s’en sont remis aux discrètes commissions du renseignement, compétentes en la matière, M. Ryan soulignant que la commission de la Chambre enquêtait déjà sur les cyber menaces étrangères. Le président de cette instance, Devin Nunes, a déclaré qu’il ne voyait « aucun avantage à ouvrir de nouvelles investigations, qui feraient doublon avec des travaux actuels ».

La Maison Blanche a annoncé lundi soutenir l’ouverture d’une enquête, le porte-parole Josh Earnest taclant au passage Donald Trump pour ses propos : « Il n’y a pas besoin d’habilitation au secret défense pour comprendre à qui les cyber-activités de la Russie ont profité. »