Jean-Pierre Mustier, le nouveau patron français d’UniCredit. | PATRICK KOVARIK / AFP

Pour la cinquième fois depuis la crise financière de 2008, UniCredit a présenté, mardi 13 décembre, un vaste plan de restructuration. Au programme : la suppression de 6 500 emplois supplémentaires – en plus des réductions d’effectifs déjà annoncées –, la cession de près de la moitié du portefeuille de mauvaises dettes, une augmentation de capital massive de 13 milliards d’euros, et la vente de plusieurs actifs… Jean-Pierre Mustier, le Français qui a pris la direction de la banque italienne en juillet, espère cette fois-ci tirer un trait définitif sur les difficultés récurrentes de l’établissement. « C’est un plan déterminé et en profondeur », a-t-il assuré depuis Londres, où il présentait la restructuration.

A son pic en 2007, UniCredit et ses 160 000 employés était présente dans 23 pays. En 2019, après la mise en place du plan annoncé ce mardi, il restera 110 000 salariés dans 14 pays, essentiellement l’Italie, l’Allemagne, l’Autriche et l’Europe centrale et orientale. Tout le système bancaire italien est touché par la crise économique du pays, embourbé pendant des années dans la récession, et depuis 2015 dans une reprise en demi-teinte. Banca Monte dei Paschi di Siena, le troisième plus gros établissement italien – et le plus vieux au monde – est le plus mal en point.

UniCredit, la première banque du pays, n’a beau réaliser que la moitié de son chiffre d’affaires en Italie, elle est inévitablement touchée. Fin juillet, l’Autorité bancaire européenne l’a pointée du doigt lors des tests de résistance (« stress tests »), estimant que l’établissement manquait de fonds propres.

Un ancien de la Société générale

Ton autoritaire, cheveux rasés au plus court, M. Mustier – un ancien de la Société générale, qui était le patron de Jérôme Kerviel au moment du scandale – a décidé de prendre les grands moyens. Conscient qu’il ne peut guère compter sur une augmentation de son chiffre d’affaires, en raison d’une croissance européenne médiocre et des taux d’intérêt à zéro, il agit sur ce qu’il peut contrôler : sa base de coûts et ses actifs.

Cela se traduit par un important plan de réduction d’effectifs. En novembre 2015, le prédécesseur de M. Mustier avait déjà annoncé une première vague de licenciements. Le Français poursuit le mouvement, en particulier en Europe occidentale (Italie, Allemagne, Autriche). Au total, entre 2015 et 2019, 14 000 emplois auront été supprimés, soit 14 % des effectifs.

UniCredit cède aussi certains de ses actifs rentables, mais jugés stratégiquement secondaires. Il a vendu au Français Amundi sa filiale de gestion d’actifs, Pioneer, et cédé 30% de Fineco, une banque en ligne italienne, tout en gardant son contrôle. Il s’est enfin retiré de Pologne, en vendant sa filiale Pekao. Ce retrait vient s’ajouter au départ ces dernières années d’Ukraine, des trois pays Baltes ou encore du Kazakhstan.

S’attaquer au boulet de la dette

M. Mustier annonce aussi une augmentation de capital de 13 milliards d’euros, qui sera lancé le mois prochain. C’est la troisième fois depuis 2008 qu’UniCredit fait appel aux actionnaires.

Enfin, le patron de la banque italienne a décidé de s’attaquer à l’héritage des mauvaises dettes passées. Comme tous les établissements du pays, qui ont trop prêté aux PME pendant les années 2000 à 2008, UniCredit traîne ce boulet, sans parvenir à s’en débarrasser. Ce mardi, il a annoncé qu’il en cédait près de la moitié, soit 17,7 milliards d’euros. Il a trouvé pour ces créances douteuses plusieurs repreneurs, qui les rachètent bien sûr à bas prix, contraignant la banque à passer 8,1 milliards d’euros de provisions pour faire face à cette perte.

Née en 1999 de la fusion de plusieurs petits établissements régionaux (Crédit romagnol, Caisse d’épargne de Turin, Banque populaire du Molise, etc.), UniCredit, dont le siège est à Milan, en Lombardie, compte environ 25 millions de clients à travers l’Europe. Sa croissance, à coups d’acquisition jusqu’en 2007, avait sans doute été trop rapide, et la banque avait été frappée de plein fouet par la crise financière de 2008. Depuis, les plans de restructuration se succèdent : 2008, 2011, 2013, 2015, et enfin ce mardi.

La crise politique en cours en Italie, après la récente démission de Matteo Renzi, peut-elle de nouveau faire dérailler le redressement d’UniCredit ? M. Mustier écarte cette hypothèse : « Notre plan n’a pas changé avant et après le référendum. L’Italie a un paysage politique dynamique, mais cela reste la huitième économie au monde et la troisième de la zone euro. »

Les actionnaires semblent avoir plutôt apprécié son plan de restructuration. Le titre a bondit de plus de 8% mardi, même si ce mouvement est presque négligeable après la chute de 60% du cours depuis mi-2015.